Profession: photographe d’enterrement

INSOLITE • Un reporter de presse écrite propose un nouveau regard sur les cérémonies funéraires. Par son travail, il soulève aussi la dalle de pas mal de préjugés.

  • Charly Schwarz s’est tourné vers une nouvelle profession pour le moins insolite.  PETER WIME-7EX

    Charly Schwarz s’est tourné vers une nouvelle profession pour le moins insolite. PETER WIME-7EX

«Je suis photographe d’enterrement», lance avec un naturel déroutant Charly Schwarz. Ce photographe de presse n’a aucun mal à parler de sa nouvelle profession pour le moins insolite. «Depuis internet et les réseaux sociaux, une certaine absence de pudeur s’est installée. Il est donc plus facile de s’attaquer aux sujets tabous comme la mort», souffle le Genevois.

Intensité dramatique

Mais comment en est-il arrivé à une telle reconversion? «Je devais me renouveler professionnellement. Très vite, je me suis aperçu que la photographie d’enterrement était une manière de le faire. Belle surprise, ces photos de moments poignants ont des effets thérapeutiques sur les survivants. Ecrasés par la douleur ou l’intensité dramatique de la cérémonie, beaucoup de personnes sont en effet absentes à elles-mêmes ou à ce qui passe autour d’elles. Il ne leur viendrait pas à l’idée de prendre des photos. Ce n’est qu’une fois le deuil passé que le besoin de se souvenir intervient. Les images permettent alors de revenir sur l’événement de manière apaisée. Très souvent, on me remercie après coup d’avoir immortalisé un moment et des émotions rares. N’oubliez pas que les enterrements sont, avec les mariages et les naissances, les seules véritables occasions de réunir les familles et les proches parfois très éloignés les uns des autres. Lors des verrées, et en dépit des circonstances, les gens sont finalement contents d’être ensemble.»

Distance critique

Cela ne doit pourtant pas être facile de se glisser dans l’intimité de personnes en deuil. Toutes ne doivent pas forcément voir d’un bon œil l’intrusion d’un photographe et de son objectif. «Je fais très attention, j’attends le feu vert de la famille pour sortir mon appareil photo. Souvent sa présence détend les convives qui commencent à leur tour à prendre des photos avec leurs smartphones. Mon rôle est de garder une distance critique en toute circonstance, de ne pas être impliqué émotionnellement pour saisir les bonnes images», éclaire Charly Schwarz.

Clichés et préjugés

Mais justement, c’est quoi une bonne image d’enterrement? «C’est notamment le cliché qui rendra les gens heureux lorsqu’ils le regarderont, longtemps après la cérémonie», répond-il, convaincu d’œuvrer dans la bonne direction. «Sans la moindre publicité, juste grâce au bouche à oreille, j’ai déjà couvert une dizaine de mandats depuis le début de l’année. Les gens sont demandeurs», précise celui qui, par l’esprit innovant de ses clichés, brouille l’image souvent douloureuse et lourde des enterrements et offre aux familles une possibilité de ne plus tout à fait passer à côté de la cérémonie d’enterrement d’un parent ou d’un proche.

Rens. charly.schwarz@7ex.ch