Ce 6 novembre 1970: des craintes pour l’AELE

FINANCE • La toute jeune Association européenne de libre-échange déjà en crise,la Communauté économique européenne qui se crée, 1970 est une année charnière.

  • Evolution de l’AELE au fil du temps. Pascal Orcier / www.nouvelle-europe.eu

    Evolution de l’AELE au fil du temps. Pascal Orcier / www.nouvelle-europe.eu

Dix ans après sa création, l’Associationeuropéenne de libre-échange est déjà à la croisée des chemins. Réunis à Genève, les huit ministres représentant les Etats membres de l’organisation se toisent sans parvenir à déterminer un consensus sur les options du futur. L’inquiétude se lit sur les visages des délégués de Suisse, Suède, Autriche, Portugal, Islande. Ces cinq nations se demandent si elles seront larguées dans la course aux échanges mondiaux. Le Royaume-Uni, le Danemark et la Norvège rejoindront-ils l’entité concurrente, la Communauté économique européenne qui leur fait les yeux doux?
Capitalisme vs socialisme
Deux blocs se partagent le monde, ils sont idéologiques. Le premier, mené par les Etats-Unis, arbore fièrement la bannière capitaliste, un système où la compétition est synonyme de course à la consommation. Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, la courbe du PIB grimpe sans rencontrer les nuages. Pourtant, des signes tangibles témoignent d’un essoufflement du modèle. L’assassinat de Kennedy et la guerre du Vietnam ont refroidi l’optimisme incorrigible des Américains dont le mode de vie bourgeois est remis en question par les hippies libertaires et quelques chanteurs engagés. Mais ce sont surtout les disciples de Malthus, ce pionnier de la décroissance, qui donnent le plus de mauvaise conscience à une humanité en passe de franchir le cap des 4 milliards d’habitants.
Le second bloc revendique l’égalité sociale sous la houlette d’une  dictature, l’URSS. Mais à Moscou, les étals vides trahissent les limites de l’expérience communiste. 
L’Europe tiraillée
Entre les deux, l’Europe meurtrie pardeux conflits mondiaux cherche sa voie. Faute de véritable projet politique et culturel, l’ouverture des marchés suffit à son bonheur, elleest devenue une fin en soi. Mais au jeudes alliances, c’est d’abord la CEE qui faitdes émules. La Suisse s’interroge: que luirestera-t-il si la Grande-Bretagne cède aux sirènes de Bruxelles? «Et puis maintenant?», demande Jasmine Audemars dans le Journalde Genève du 7 novembre 1970. L’éditorialiste redoute que les égoïsmes nationaux ne reprennent le dessus. Les barrières que l’on a misdes années à démanteler renaîtront-elles? Basée à Genève, l’AELE mourra-t-elle de sa belle mort? 45 ans plus tard, l’organisation réduite à quatre vacille toujours mais elle vit encore.