Je suis une femme de 31 ans qui a eu recours à un avortement en 2010 sans que ma famille ni mes amis ne soient au courant. L’homme concerné n’était pas à mes côtés. Depuis lors je n’ai eu aucune relation sérieuse et ressens un blocage profond. Comment aller de l’avant 6 ans après cette intervention?
Le secret complet dans lequel vous avez maintenu cette interruption de grossesse vous a empêché d’en parler à qui que ce soit de votre entourage. Il est probable que ce geste – qui n’est jamais anodin – vous pèse encore sur la conscience. Votre décision de ne pas garder cet enfant était-elle mûrement réfléchie? Dans quelles circonstances l’avez-vous prise? En avez-vous parlé avec votre partenaire de l’époque et fait ce choix à deux? Etait-il d’accord avec vous ou pas? Pensez-vous que vos raisons étaient bonnes et justifiées, ou avez-vous agi très rapidement, sans avoir le temps de bien peser le pour et le contre de cet acte important? Et les professionnels de la santé qui vous ont accompagnée dans cette mésaventure vous ont-ils offert un espace de parole dont vous aviez d’autant plus besoin que vous n’avez rien dit à vos proches? Ces questions sont cruciales et influencent la façon dont une femme intègre physiquement, moralement et émotionnellement cette intervention qui touche au plus profond de son être et de sa féminité.
Est-ce la culpabilité qui vous bloque encore et vous empêche de vous remettre en couple? Ou les regrets qui vous dévorent en sourdine et freinent toutes vos velléités relationnelles? Ou encore le poids de votre éducation familiale ou religieuse qui vous retient de vous engager avec un autre homme? Car vous décrivez avoir eu depuis lors quelques relations sexuelles avec des hommes, mais avec beaucoup de mal et de réticence. La peur de revivre cette expérience traumatisante reste si présente qu’elle vous retient de faire l’amour, ce d’autant plus que vous ne prenez aucun moyen de contraception efficace. Pour sortir de cette impasse, je vous conseille d’aller voir un-e psy qui vous aidera à voir plus clair dans votre esprit. Et à faire le deuil de cet enfant qui n’a pas vu le jour mais qui reste encore si présent dans votre mémoire qu’il vous empêche de construire une nouvelle relation de couple et peut-être même, à terme, une famille.
Pour une réponse personnelle, écrivez à: Dr Juliette Buffat, GHI, CP 167, 1211 Genève 4. Joindre une grande enveloppe (18x25 cm) timbrée. Les lettres ne sont pas ouvertes par la rédaction. Ou envoyez vos questions par e-mail à l’adresse: cherejuliette@ghi.ch