«Bonzour, fous barlez alban? Sprenchen sie doutsch?» demande dans un langage incompréhensible, un homme avec un accent douteux, entre le hochdeutsch et une pointe d’arabe. Au bout du natel, l’interlocuteur ne comprend rien: «Non pourquoi?» Et hop, l’homme raccroche. Dix minutes plus tard, rebelote. Un autre téléphone provenant d’un indicatif suisse similaire s’est répété et la Genevoise se fait toujours raccrocher au nez. En une seule journée, elle a reçu, une dizaine d’appels identiques. A n’y rien comprendre.
Inquiétante vague
Ces dernières semaines, de nombreux assurés genevois ont été victimes de ce type de harcèlement téléphonique. «Moi, j’ai répondu que je parlais allemand et là on m’a expliqué qu’il était urgent que je change de caisse maladie, que je devais prendre rendez-vous avec eux… Et dès que j’ai questionné sur qui ils étaient, on m’a raccroché au nez.» Daniel, Sandra ou encore Joëlle ont signalé ces abus à la Fédération romande des consommateurs (FRC).
«Nous avons effectivement des plaintes pour du télémarketing sur natels, confirme Mathieu Fleury, sercrétaire général de la FRC. Le phénomène est nouveau.»
Hausse des primes
Si ces harcèlements téléphoniques déferlent actuellement, bien entendu, c’est parce que les Suisses viennent de subir de fortes hausses de primes maladies. Quel est le but des démarcheurs? «La technique baptisée spoofing, consiste à usurper un numéro existant, qui sera affiché en lieu et place du numéro de l’appelant, détaille Mathieu Fleury. Ces escrocs veulent alpaguer un assuré, leur donner rendez-vous et leur démontrer que telle assurance est mieux que l’autre.» Et d’enchaîner: «En réalité, ce sont des ordinateurs qui font des téléphones automatiques. Les appels proviennent d’Afrique du Nord. Ce sont des gens malveillants, contactés sans doute par des courtiers en assurances suisses, qui vendent des carnets d’adresses.» In fine, le but est de donner aux démarcheurs une jolie commission. «Nous avons mis en garde les assureurs car il s’agit d’un délit pénal», rappelle Mathieu Fleury.
L’ASSUAS veille au grain
Du côté de la section genevoise de l’association des assureurs (ASSUAS), on confirme être au courant de ces pratiques, tout en admettant la difficulté de remonter les filières. «Il est indispensable d’actionner la justice pour aider les enquêteurs qui luttent contre les cyberescrocs, appuie son président Jean-Paul Derouette. Nous conseillons aussi aux victimes de nous contacter rapidement afin qu’elles ne se fassent pas piéger par des soi-disantes validations de contrats par téléphone.» Si les réclamations sont nombreuses, l’ASSUAS prévoit même des lettres types pour aider les victimes.