Nationalité d’Ayop Aziz: le doute est permis

CONTROVERSE • Alors qu’il se dit Tchadien, le requérant d’asile pourrait en réalité être Nigérian. Une différence qui ne se serait pas sans conséquence...

  • Lors des manifestations de soutien aux migrants des Tattes. DR

    Lors des manifestations de soutien aux migrants des Tattes. DR

Le requérant Ayop Aziz avait échappé, in extremis, à son renvoi vers l’Espagne en mars dernier, notamment grâce aux associations pro-asile qui en avaient fait leur figure emblématique dans leur combat contre les renvois. Son cas avait été au devant de la scène médiatique et lors d’un entretien avec la Tribune de Genève, le 28 mars dernier, il avait affirmé être né dans un petit village du Tchad et qu’il ne savait rien de ses parents, ni s’il avait des frères et sœurs. Est-ce qu’il a vraiment dit la vérité? En consultant sa page Facebook, il est permis d’en douter.

Est-il Nigérian?

Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’Ayop Aziz est très actif sur Facebook, il donne l’image de quelqu’un de religieux, le nom de Jésus revient systématiquement sur son mur. En consultant attentivement sa page, Ayop Aziz semblerait plutôt provenir du Nigeria comme en témoignent les nombreux patronymes nigérians parmi ses amis. Le 1er juillet 2014, dans un message adressé à ses amis, il cite même le Nigeria en écrivant «notre pays», il poste également de nombreuses photos de joueurs de l’équipe nationale du Nigéria en faisant son éloge et en revendiquant une proximité avec celle-ci.

A la Tribune de Genève, il affirme ne pas savoir s’il a des frères et sœurs, pourtant il poste plusieurs photos de lui sur son mur en compagnie d’un bébé en affirmant que c’est le fils de son frère aîné. Contacté, le Département de la sécurité et de l’économie ne se prononce pas sur les cas particuliers, comme l’indique Emmanuelle Lo Verso, du service de communication.

Jointe également, l’avocate d’Ayop Aziz, Me Laïla Batou, ne peut pas nous donner des détails sur la procédure d’asile de son client. Elle l’a en revanche contacté et il a souhaité nous transmettre le communiqué suivant: «Je ne suis pas sûr que je sois originaire du Tchad. J’ai été élevé toute ma vie au Tchad, après qu’un orphelinat m’a recueilli. Enfant, on m’a dit que mes parents étaient morts dans un conflit armé, mais je ne sais pas dans quel pays. Les autorités suisses ont affirmé que j’étais Ethiopien. Elles ont ensuite pensé que j’étais Nigérian. De mon côté, le seul père que je me connaisse est le prêtre britannique qui m’a élevé. Cela ne fait pas de moi un citoyen britannique. Je suis étranger partout, mais c’est en Suisse que j’ai rencontré des gens de cœur qui m’ont ouvert leurs bras.»

A qui profite le doute?

On peut soupçonner qu’Ayop Aziz se soit fait passer pour un ressortissant tchadien parce que le taux d’octroi d’asile aux requérants du Nigeria est très faible en Suisse, ils sont le plus souvent considérés par les autorités comme des migrants économiques. En 2009, un seul ressortissant du Nigeria avait obtenu l’asile sur 1800 demandes. Il est à prévoir que les organismes chargés de l’octroi de sa demande d’asile se penchent désormais d’un peu plus près sur son cas pour vérifier les contradictions entre les déclarations faites à la presse et sur ce qu’il affiche sur un réseau social.

Qui est Ayop?

ChZ • Qui est ce requérant d’asile menacé d’être refoulé? Ayop, 19 ans, s’est annoncé aux autorités helvètes comme ressortissant tchadien. Dans un article de la Tribune de Genève de mars 2015, il dit être né à Bethel, un petit village du Tchad situé à la frontière centrafricaine. Il ne sait rien de ses parents, ni s’il a des frères et sœurs. Ayop a défrayé la chronique en novembre 2014 lors de l’incendie du centre de réfugiés des Tattes à Vernier. Il avait chuté depuis le troisième étage et, blessé à la tête, avait dû être hospitalisé. Un accident qui lui a évité de justesse son retour vers l’Espagne, premier pays de l’espace Schengen où il a été enregistré.