Un automobiliste s’arrête à une pompe de la station-service Total de Ferney et repart sans même être descendu de son véhicule. Puis un autre. Une situation qui s’explique simplement: jeudi 26 mai, du diesel il n’y en avait plus*! «On nous dit que c’est réservé pour la police et la gendarmerie», s’exclame un jeune, rigolard, qui n’a pas pu obtenir le précieux carburant. Pour les autres, il était possible de se servir en essence sans plomb mais dans la limite de 20 l. Sandrine, qui travaille pour la station ferneysienne, indique: «On est en pénurie comme les autres stations mais la différence, dans notre région, c’est que les gens peuvent se servir en Suisse. C’est peut-être moins grave qu’ailleurs.»
Automobilistes inquiets
Ici, pas de ruée sur les jerricans, ni de siphonage de réservoir, mais des automobilistes inquiets, qui se renseignent. C’est le cas de Nicole, la Divonnaise. «Je dois aller à Paris. La situation remet en question ce voyage, annonce-t-elle, préoccupée. Mais, dans l’immédiat, je vais aller faire le plein en Suisse!» Jeune haut-savoyarde, Hélène ne dit pas autre chose: «Je sais qu’il reste de l’essence ici. Là où j’habite (Annemasse), il n’y en a plus. En Suisse, c’est plus cher, mais en dernier recours…»
Pragmatisme suisse
Et les ressortissants helvétiques, comment voient-ils la situation? De manière réaliste, à l’image d’Alves, venu faire le plein au Grand-Saconnex: «Je travaille à côté d’ici, j’habite à Soral, je fais comme d’habitude. La situation française ne me préoccupe pas. Il y aura assez d’essence si tout le monde partage.» Pas d’inquiétude, donc, quant à une éventuelle ruée des frontaliers sur l’or noir? «Les frontaliers travaillent ici, il faut bien qu’ils mettent de l’essence…» Pragmatique, Alves, définitivement. Saliha, elle, apporte un peu de recul à cette situation. Vendeuse dans une station BP, elle dit avoir enregistré «une hausse d’activité d’un peu plus de 20%», depuis le début de cette crise. «Les clients français, qui venaient moins souvent (ndlr, depuis le renchérissement du franc suisse, début 2015), reviennent. Certains s’inquiètent que cette situation dure…»
De l’inquiétude légitime à la psychose, il n’y a qu’un pas que Stéphane, de passage en Suisse, ne franchit pas: «Il y a de l’essence en France. Sauf que certains remplissent des jerricans, ça crée la pénurie. Pourquoi je m’inquiéterais? J’ai pris de l’essence sur l’autoroute (française), il y avait seulement quatre voitures. Toute cette parano est entretenue par les médias. Moi, je ne regarde pas les infos… et j’ai de l’essence!» * La situation est revenue à la normale en début de semaine.