La mort annoncée des facteurs

- La fermeture programmée de quelque 600 offices de poste et la perte de 1200 emplois suscitent la colère.
- La dématérialisation du courrier met en péril le métier de facteur
- La Poste s’en défend en affirmant qu’il ne s’agit que de spéculations.

  • Le métier de facteur est menacé par la numérisation du courrier. DR

    Le métier de facteur est menacé par la numérisation du courrier. DR

  • Le métier de facteur est menacé par la numérisation du courrier. DR

    Le métier de facteur est menacé par la numérisation du courrier. DR

«La transformation du réseau pourrait impacter 700 postes d’ici 2020»

Nathalie Dérobert Fellay, porte-parole de La Poste

Trop, c’est trop! A l’initiative de Syndicom, syndicat des médias et de la communication, une centaine de personnes ont manifesté devant l’office de Poste de la Servette. C’était à la fin du mois de février. Dans le même temps, le parti socialiste genevois faisait part de son mécontentement dans un communiqué: «500 à 600 offices sont aujourd’hui menacés en Suisse, alors que la Poste réalise des centaines de millions de francs de bénéfices chaque année».

Calmer le jeu

Pour mémoire, la Poste emploie 1409 collaborateurs et dispose de 54 offices dans le canton de Genève. Parmi ces derniers, combien vont disparaître? 5, 10, 20? La porte-parole du géant jaune, Nathalie Dérobert Fellay refuse d’y répondre. Elle tente plutôt de calmer le jeu: «Toute supposition concernant le développement du réseau postal dans les différents cantons n’est que pure spéculation. Ceci nourrit un sentiment d’incertitude et de peur. Ce n’est ni pertinent, ni constructif.» Avant de concéder: «La transformation du réseau pourrait impacter environ 700 postes à temps plein d’ici 2020 en Suisse, c’est-à-dire concerner environ 1200 collaborateurs.» Raison invoquée? La numérisation et le changement des habitudes de la clientèle font que les volumes aux guichets sont en diminution constante. Depuis l’an 2000, la baisse a atteint -65% pour les lettres, -46% pour les colis et -40% pour les versements.

Innovation genevoise

Surfant sur cette vague descendante, une start-up genevoise vient d’ailleurs de lancer une plate-forme entièrement numérique pour gérer lettres et factures. Quand on lui demande s’il contribue à la disparition des facteurs, François-Philippe Pic, directeur général de RedTape, sourit: «Notre start-up contribue surtout à rendre les boîtes aux lettres désuètes. Nous ne tuons pas le métier de facteur car les colis devront toujours être livrés.» S’inscrivant dans une tendance généralisée à la dématérialisation, la société genevoise promet de réceptionner, traiter et stocker les documents reçus par courrier sur une plate-forme en ligne sécurisée et accessible à tout moment.

Nouveaux besoins

La Poste, de son côté, s’inscrit également dans cette tendance avec une solution hybride baptisée E-Post Office. Chaque client a le choix, il peut, par exemple, recevoir les factures de sa caisse maladie par voie électronique et les relevés bancaires par courrier postal.

Pour Charles*, facteur depuis vingt ans, ces nouveaux services tuent à petit feu son métier: «Je passe mes journées à livrer des colis, je n’ai plus le temps de m’arrêter quelques minutes pour discuter avec les gens du quartier. On oublie que les facteurs ont toujours eu un rôle social à jouer. C’est vraiment dommage!» Il y a fort à parier que ce cri de désespoir d’un postier au long cours reste lettre morte! * prénom fictif connu de la rédaction