Night-clubs à l’agonie

- L’univers de la nuit n’est plus rentable. Certains night-clubs sont au bord du gouffre financier.
- Hausses de loyers, taxes, augmentation des cachets d’artistes plombent les bilans.
- La politique sécuritaire et la limitation des nuisances sonores accentuent la crise.

  • A Genève, le monde de la nuit est en pleine détresse. STEF

    A Genève, le monde de la nuit est en pleine détresse. STEF

«Il existe une tension entre ceux qui veulent sortir et ceux qui veulent dormir»

Sami Kanaan, maire de Genève

Hausses de loyers, taxes à la pelle, augmentation des cachets des artistes, décentralisation... Les night-clubs trinquent. Hormis les lieux commerciaux du centre-ville qui profitent encore de la jeunesse dorée, les temps sont durs et certains clubs se disent au bord du gouffre financier.

Loyers vertigineux

«C’est un secteur d’activité qui subit de nombreuses pressions économiques», affirme Alan Bolumar, co-président du Grand Conseil de la nuit. Au MOA à Vernier on ne cache pas son inquiétude. «Le loyer annuel est passé de 100’000 à 180’000 francs en un an. Dans quelques années il atteindra 300’000 francs. C’est dommage parce que maintenant, nous supprimons un poste de travail par année. En 2 ans, nous sommes passés de 11 à 7 collaborateurs», s’étrangle Sébastien Courage, directeur du MOA. Le constat est similaire au Moulin à Danses (MàD). «Depuis quelque temps, c’est vraiment devenu difficile. On a donc dû se séparer de plusieurs personnes l’an passé», regrette Fiona Mac Phail, présidente du MàD.

Taxes à la pelle

A ces hausses de loyers, il faut ajouter une pléthore de taxes. «A chaque fois que l’Etat nous gratifie d’une nouvelle taxe ou d’une hausse de loyer, c’est aussi moins de budget pour l’artistique», regrette Sébastien Courage. Et les cachets des musiciens ont eux aussi augmenté. «Cette année, nous avons dû renoncer aux artistes internationaux», conclut le directeur du MOA. Au Palais Mascotte, le bilan se veut plus nuancé. «Il y a plus de 25 taxes différentes. Ce sont des milliers de francs dépensés tous les mois, développe Jean-François Schlemmer, directeur du Palais Mascotte.»

Décentralisation

Ces pressions économiques s’accompagnent d’une politique de plus en plus répressive à l’encontre des établissements. Elle vise principalement à garantir la sécurité et à diminuer les nuisances sonores. Pour Pierre Maudet, conseiller d’Etat en charge de la sécurité, cette politique n’est pas un frein à la vie nocturne. «Une bonne sécurité permet à l’exploitant de ne pas devoir faire face à trop de problématiques liées aux actes de vandalisme ou aux nuisances sonores.» Mais pour les exploitants, les conséquences sont autres. En effet, plusieurs clubs ont été exilés en périphérie. «Le déplacement du MàD de Plainpalais aux Charmilles, à fortement impacté notre clientèle, explique Fiona Mac Phail. De plus, on n’a pas pensé au déplacement des jeunes au moment d’extérioriser les clubs. C’est dommage, parce que ça met en danger ceux qui prennent leur voiture.»

Sécurité

Pour Sami Kanaan, maire de la Ville de Genève, il ne fait aucun doute, les temps sont durs pour les établissements nocturnes . «Il existe une véritable tension entre ceux qui veulent sortir et ceux qui veulent dormir, développe le maire. La politique très sécuritaire est malheureusement dans l’esprit du temps. A terme, le risque est de voir le centre-ville déserté. Ce qui pourrait produire l’effet inverse: une plus grande insécurité.» Entre divergences politiques et étouffement financier, les clubs continuent néanmoins à résister. Procès, pétitions ou mobilisation… des moyens existent même si l’optimisme n’est pas toujours de mise.

Le regard des noctambules

1- Que pensez-vous de la vie nocturne à Genève?

Alienor, 29 ans,

marketing.

L’offre s’améliore à Genève reste que, la réglementation sur le bruit est un frein au développement de la vie nocturne.

Lenni, 26 ans,

étudiant.

Il y a quand même pas mal de bons DJ’s qui viennent à Genève. La programmation est plutôt bonne, même si le choix reste limité.

Nora, 27 ans,

e-commerce.

L’offre culturelle est peu diversifiée. En plus, les politiques rendent la vie dure aux lieux alternatifs quand ils ne les suppriment pas.

Corentin, 29 ans, employé de banque.

Elle est de plus en plus alternative et ponctuelle. Au niveau politique, on n’encourage pas la vie nocture dans son ensemble.