Passeport-Vacances: le raté du DIP

BUDGET • Comment ne pas prendre la suppression de Passeport-Vacances comme une leçon aux députés qui voulaient des coupes? Mauvaise stratégie: on ne prend pas ainsi les élèves en otages!

  • Cette prestation évitait l’ennui aux enfants qui n’avaient pas la chance de partir en vacances. ISTOCK/LOVELEAH

    Cette prestation évitait l’ennui aux enfants qui n’avaient pas la chance de partir en vacances. ISTOCK/LOVELEAH

  • Cette prestation évitait l’ennui aux enfants qui n’avaient pas la chance de partir en vacances. ISTOCK/LOVELEAH

    Cette prestation évitait l’ennui aux enfants qui n’avaient pas la chance de partir en vacances. ISTOCK/LOVELEAH

«Des économies, au DIP, on peut encore en faire! Dans les états-majors»

Pascal Décaillet

En supprimant le Passeport-Vacances, la ministre genevoise de l’Instruction publique, Anne Emery-Torracinta, a commis une erreur tactique, doublée d’une faute de goût. En voulant donner une leçon, bien parlante, aux méchants députés qui veulent couper dans son budget, cette magistrate, d’ordinaire mieux inspirée, a manqué sa cible. Sous l’impulsion d’une résolution PLR, elle a réussi, jeudi 4 février, à s’attirer l’opposition de tout le Grand Conseil, pour que la prestation soit maintenue. Signal de défiance de la députation face à une solution qui n’était pas bonne et donnait l’impression de prendre en otages les enfants dans le cadre d’un règlement de comptes politique.

Service d’utilité publique

Le Passeport-Vacances est une belle et noble prestation qui propose, depuis plus de 35 ans, des activités de plein air, sport, pratique artistique ou visites d’entreprises, pendant l’été, à des jeunes de 10 à 15 ans. Fin de l’école primaire, période du Cycle d’Orientation. Tous les enfants n’ont pas la chance de partir en vacances, leurs familles n’en ont pas toutes les moyens, cette prise en charge occupe intelligemment les jeunes, leur évite l’ennui, l’oisiveté, leur crée des contacts. Bref, un service d’utilité publique.

Maladresse politique

Officiellement, la suppression était due à une baisse de fréquentation. Soit. Mais franchement, dans le contexte budgétaire qui fut celui de l’automne 2015, et qui n’est du reste pas encore résolu, l’argument ne trompe personne. Et il est très difficile de ne pas voir, dans la décision du DIP, une petite leçon qu’on aurait voulu donner à une majorité du Grand Conseil récalcitrante, lorsqu’il s’agit de voter aveuglément les crédits. Eh bien cette tentative de leçon est un tort. Une maladresse politique. Il était bien normal qu’elle se retournât contre ses auteurs.

Economie minime

Car enfin, que représentent cinquante mille francs, par rapport à l’impressionnant budget annuel du DIP? Même pas une goutte d’eau! C’est vrai, depuis l’automne 2013, il existe une nouvelle majorité, au Grand Conseil, pour se montrer beaucoup plus sévère qu’avant dans l’examen du budget. Ces députés sont dans leur rôle: le Parlement a pour mission de voter le budget, de façon politique, antagoniste et disputée, et non comme une simple Chambre d’enregistrement. Or, des économies, au DIP, on peut encore en faire! Dans les états-majors. La députation est parfaitement dans son rôle de contrôle, lorsqu’elle le signifie au ministre. Il n’y a là aucun putsch, bien au contraire: juste l’exercice normal de notre démocratie.

Signal irrecevable

Il n’était donc pas vain, dans ces conditions, de montrer à la cheffe du DIP que son signal n’était pas recevable. Et il est assurément étonnant d’entendre la ministre affirmer que techniquement, Passeport-Vacances 2016 pourrait difficilement assumer les mêmes prestations que d’ordinaire. A cinq mois des vacances d’été, que signifie cette nouvelle menace? On aimerait, dans toute cette affaire, un peu plus de bonne foi, de clairvoyance, et de sens des priorités. Pour l’intérêt des premiers concernés: les enfants de nos écoles.