Commentaire - Fille aînée de la lumière

  • Pascal Décaillet

    Pascal Décaillet

Il y a eu Mix, et puis il y a eu Burki. Ces deux génies du dessin de presse, emportés à quelques jours d’intervalle. Ils étaient, l’un et l’autre, d’une qualité supérieure. Ils croquaient. Laissaient voir. Donnaient à entendre. Sans donner l’impression de juger. D’autant plus vif était le trait. D’autant plus tranchante, la saignée. Non pour promouvoir un ordre moral, de gauche ou de droite. Mais pour communier dans l’intime – et pourtant partagée – compréhension de l’événement.

Car ces deux hommes, en plus de leur génie du dessin, étaient, profondément, des journalistes. Hypersensibles à l’événement. Un journaliste, c’est quelqu’un qui vibre avec l’actualité, il ne vit que par elle, il la respire, il en suinte, il en rêve. Il tâche de lui coller au plus près: se perdre en elle, pour mieux la sentir. Ce qui frappe, dans les dessins de Mix, ceux de Burki, c’est l’immense intelligence de leur rapport avec l’actualité. Il y a, chez, eux, des flammes d’instinct pour illuminer notre perception de l’événement.

Et puis, cette complicité avec le lecteur. Saisi, d’un coup. Emporté. Arraché à la banalité répétée du monde. Envolé. Vers quelque univers céleste, supérieur, dégagé de toute pesanteur, où seule régnerait la forme ravie, fille aînée de la lumière. Et cette intelligence, non gardée pour soi par le dessinateur, mais partagée avec le plus grand nombre. Si cela, ça n’est pas l’essence supérieure du journalisme, alors merci de bien vouloir m’expliquer, au débutant que je suis, ce que cela peut bien être, le journalisme.