Favrod: mémoire et lumière

  • Pascal Décaillet. dr

    Pascal Décaillet. dr

 

Infatigable journaliste, à la Gazette de Lausanne dès le début des années 50, puis à la radio, patron du Musée de l’Elysée à Lausanne, fou de photographie, Charles-Henri Favrod (1927-2017), qui vient de nous quitter à presque 90 ans, était un grand. Pour avoir eu souvent le privilège de le rencontrer, l’interviewer, pour des journaux, radios ou mes émissions historiques, je puis témoigner de sa curiosité, ses antennes, son ouverture, son immense culture, sa fièvre d’entrevoir le monde, tenter de comprendre.

J’ai beaucoup travaillé sur la Guerre d’Algérie (1954-1962), l’une de mes passions historiques. Charles-Henri Favrod, qui avait fait son premier reportage dans ce pays pour la Gazette, en 1952, avait passé les années cinquante à y tisser, notamment avec les forces indépendantistes, le FLN, un incroyable réseau de relations personnelles qui lui permettait de discuter avec tout le monde.

Du coup, cet homme d’une rare ductilité a joué un rôle dans les longues et difficiles négociations entre le pouvoir français et le FLN, qui ont abouti en 1962 aux Accords d’Evian, donc à la fin de huit ans de guerre, et surtout de 132 ans de présence française en Algérie. Lui, Favrod! Un journaliste suisse, respecté de tous, connaissant tout le monde, le terrain, les hommes, les conflits internes, les dossiers. Hommage à cet homme d’intelligence et de lumière. Celle, étymologique, de la photographie. Celle, plus intérieure, qui relie les êtres et enfante la lucidité.