Que ce soit lundi ou vendredi après-midi, dans les allées de Confédération Centre, les clients se comptent sur les doigts des deux mains tout au plus. La vendeuse d’un magasin de sacs à main regarde avec espoir la journaliste qui entre dans sa boutique désespérément vide. Son sourire s’évanouit en comprenant qu’il n’y aura pas de vente à la clé. «On n’a pas beaucoup de passage», euphémise-t-elle.
Non loin de là, le vendeur de Tesla paraît bien seul, lui aussi. Et pas une voiture électrique n’est exposée dans ce showroom immense et immaculé.
Ouverture de Dreamscape
En ce début d’été, c’est au sous-sol qu’il faut descendre pour trouver de l’activité. Du moins, ce sera le cas à partir du mercredi 6 juillet, date d’ouverture de Dreamscape. Le centre de réalité virtuelle high-tech, dont nous vous annoncions la venue en novembre (lire notre édition du 3.11.2021) proposera dans un premier temps aux spectateurs de plonger dans la Genève de 1850.
Retour en 2022 et dans les étages. Alors que Confédération Centre annonçait l’arrivée de nombreuses enseignes dans un communiqué daté du 3 mars 2022, les arcades fermées sont encore légion. «C’est beau, mais c’est vide», résume une passante qui découvre les lieux.
L’ouverture de la boutique permanente de Hot Box au premier étage jusqu’alors en boutique éphémère au rez-de-chaussée devait se faire en avril, ce sera finalement début juillet.
Côté restauration, le food court Spoon a, lui, rempli ses promesses et sert ses clients depuis avril. Le bar à vin en revanche se fait attendre tout comme le restaurant la Capocaccia. L’épicerie fine la Truffière devrait finalement démarrer en août. Enfin, pour retourner au cinéma dans les Rues-Basses, il faudra aussi patienter.
En attendant que le centre ne se remplisse, pour les quelques commerçants installés depuis l’ouverture officielle, soit le 4 décembre 2021, c’est la soupe à la grimace. En off, ils sont plusieurs à déplorer l’absence d’une enseigne phare qui servirait de locomotive pour tout le centre. Et à se plaindre des nombreuses arcades fermées. «Ça donne l’impression que le bâtiment est toujours en travaux», regrette l’un d’eux. «Objectivement, c’est une ouverture ratée», lâche un fin connaisseur du tissu économique local.
Si beaucoup n’osent pas critiquer ouvertement CBRE, responsable de la commercialisation des arcades ou même la direction de Confédération Centre, Albert El-Eini, propriétaire d’Hot Box a décidé de prendre le taureau par les cornes. Et de défendre sa cause devant la justice. «Un huissier est venu constater toutes les malfaçons et les couacs », explique-t-il.
Le document, établi fin mai, dresse la liste: accès peu visible depuis l’extérieur; aucune publicité pour l’ouverture du centre ou encore aucun banc, ni aucune poubelle à l’intérieur. «Le système de ventilation est défectueux. Résultat: les odeurs de cuisine se répandent dans les boutiques», poursuit Albert El-Eini.
La Redoute est partie
«CBRE nous avait promis que tout serait loué d’ici mars 2022, souligne-t-il. On en est loin! C’est joli certes mais mal organisé et mal géré. De plus, le bailleur est distant et n’informe pas ses locataires.» Selon ses calculs, la fréquentation atteint maximum 35 personnes sur les trois étages. Pas de quoi remplir les caisses. «Il manque une locomotive. Trois grandes enseignes ont refusé...» Plus étonnant encore, de source sûre, le bailleur a de son côté refusé des candidatures sérieuses.
S’ajoute la multiplication de boutiques éphémères, dites «pop-up» dans le centre. «Que se passera-t-il quand elles partiront? C’est déjà le cas de la Redoute qui a fermé le 1er juillet. Qui plus est, ces pop-up bénéficient de loyers à prix cassés alors que nous payons plein pot!» Et un autre commercant de renchérir: «On paie 100% de loyer pour une prestation qui atteint 35% à peine de ce qui était prévu.» Et Albert El-Eini de conclure: «Si cet état perdure, cela deviendra un centre en perdition, un centre de seconde zone.»