EH BIEN, DERANGEONS!

On me soupçonnera difficilement d’être un adversaire de la culture. Mais il faut briser les tabous, quitte à irriter les clans, les coteries, les cléricatures. Oui, il y a peut-être trop d’offres de spectacles en Suisse romande. Pourquoi faudrait-il le taire, si c’est une réalité?

Trop de spectacles, et notamment à Genève. Peut-être pas trop de subventions, ne discutons pas l’enveloppe générale. Mais sans doute une conception trop «arrosoir» de leur octroi. Au lieu d’oser des choix, quitte à déplaire, se faire des ennemis, on distribue tous azimuts, un peu à gauche, un peu à droite. Nul n’a trop, c’est sûr, tous vivotent, nous savons à quel point ces métiers-là sont précaires. Nous sommes les premiers à demander des solutions nationales pour aider ces magnifiques professions de la scène, leur inventer un statut permettant de vivre dignement, sans que les périodes de vide, entre deux engagements, soient pour elles des trous financiers.

Aider les gens, oui. Les soutenir. Mais oser soulever le tabou de la surabondance d’une offre, dont l’aspect qualitatif est pour le moins (je reste poli) inégal. Le public a besoin de culture. Mais pas de pléthore. Ceux qui ont à opérer des choix artistiques (monter tel spectacle, plutôt qu’un autre) le font-ils toujours au nom de l’impératif supérieur de la qualité? Ou hélas, trop souvent, par automatismes, par copinage, par réseaux d’habitudes? Ces questions-là sont dérangeantes, pour le milieu? Eh bien, dérangeons!