Chefs-d’œuvre cherchent vérité

TRÉSORS PILLÉS • Daté du 24 mai 1971, le courrier adressé au Bureau international de la propriété intellectuelle à Genève porte la signature de Paul Renoir. 

  • Renoir beach scene - HumanSeeHumanDo

    Renoir beach scene - crédit: HumanSeeHumanDo

Le petit-fils du peintre impressionniste s’en prend à un expert lausannois réputé qui a refusé d’authentifier une œuvre de Renoir. Vingt ans plus tard, le même spécialiste hausse les épaules devant une collection de 550 toiles non répertoriées, entassées dans un sous-sol à Genthod. Elles portent des signatures prestigieuses: Klimt, Van Gogh, Pissarro, Sisley, Courbet, Corot... L’occupant de la maison, un antiquaire genevois, assure qu’il ne s’agit pas de copies et raconte qu’il a découvert ce trésor dans la cave d’un propriétaire de cinémas domicilié à Plainpalais. Avant de mourir, cet homme lui a confié que les œuvres provenaient de juifs spoliés durant la guerre. Jugé puis acquitté en 2006, l’antiquaire finira par céder des tableaux au plus offrant, ne parvenant jamais à briser le mur du déni institutionnel. «Les marges ici peuvent être plus élevées que sur le marché de la drogue. La mafia internationale de l’art, craignant un écroulement des prix, ne reconnaît comme authentiques que les tableaux qu’elle contrôle.» Cette réaction désabusée de l’intéressé prend une résonance particulière après la découverte de 1400 toiles de maîtres au domicile munichois de l’héritier d’un marchand d’art proche du régime nazi. A qui appartenaient ces toiles? Sont-elles toutes originales? Potentiels acquéreurs de tels biens, les musées se murent dans un silence embarrassé. Devront-ils restituer des tableaux? L’affaire soulève une infinité de questions auxquelles les autorités ne semblent pas pressées de répondre. Dans l’attente d’une vérité qui ne viendra peut-être jamais, les chefs-d’œuvre supposés peuvent retourner dans leur tombeau.