Friedman, le Chili et la Grèce

PRIVATISATIONS • Les pays de la zone euro ne sont pas de bons élèves, ils doivent accélérer leurs réformes structurelles, a tancé à Bruxelles un responsable du FMI. Comprenez entre les lignes: ces Etats seraient bien inspirés d’accélérer la poursuite des privatisations s’ils entendent résorber le chômage. FMI, privatisations: cela vous dit quelque chose? Si ce n’est pas le cas, lisez Privatisations du syndicaliste tessinois Graziano Pestoni. Ce livre vient d’être traduit en français aux Editions d’en bas par le comédien et militant ouvrier genevois Michel Zimmermann. Vous y apprendrez que la première nation à avoir appliqué les préceptes du théoricien libéral américain Milton Friedman à compter des années 1970 fut le... Chili de Pinochet. Fossoyeur du service public, Friedman misait sur l’affaiblissement structurel résultant d’une crise politique et économique pour accélérer le dépeçage. Au vu des événements récents dans la patrie du Parthénon, la stratégie donne froid dans le dos. Parce que nul ne saurait prétendre à l’immunité et survoler la mêlée, le cas suisse intéresse au premier chef l’auteur de l’ouvrage. A partir des années 1970, a été entamée «une politique de destruction de l’Etat et de la société, sans précédent dans l’histoire de notre pays». Télécoms, postes, chemins de fer, énergie, hôpitaux, radio et télévision: rien ne résiste au rouleau compresseur de «puissants groupes d’intérêts».

La Suisse n’est pas la Grèce mais les acteurs de la stratégie de la terre brûlée, qu’ils s’appellent FMI, UE ou BCE, la fameuse troïka, rôdent dans ses environs. Négociés en secret, le traité transatlantique ou l’Accord sur le commerce des services ne présagent rien de bon. La roue peut encore tourner mais l’effort requis nécessite une mobilisation à grande échelle de la base citoyenne motivée par une volonté collective «replaçant au centre la dignité de la personne humaine».