Chéreau: mort d'un génie

  • Chéreau: mort d'un génie

    Chéreau: mort d'un génie

HOMMAGE • C'était un homme au regard de feu, profond, intense, on avait l'impression qu'il était toujours sur les planches, et vous fixait. Un homme qui n'a vécu que pour la mise en scène: il y fut un des plus grands. Avec grande émotion, au soir de ce lundi 7 octobre, nous avons appris sa mort, d'un cancer. Patrice Chéreau n'avait que 68 ans. Il avait voué sa vie à son œuvre. Infatigable. Dès lors, tant de pensées nous ont traversés, l'une pour Claude Stratz, également disparu, qui avait travaillé avec lui. L'autre pour l'Homme blessé, ce film si bouleversant sur l'homosexualité. L'autre pour La Reine Margot, saisissante évocation des Guerres de Religion, avec notamment Isabelle Adjani. Une autre encore, bien sûr, pour ses mises en scène de la Tétralogie de Wagner.Pour ma part, Chéreau m'a offert le plus beau moment de théâtre de ma vie. C'était il y a près de vingt ans, dans les Usines de Sécheron qui avaient été celles de mon enfance, Dans la Solitude des Champs de Coton, de Koltès. Une salle, sobre et vide, ancien atelier mécanique, toute en longueur. Deux hommes, Chéreau et Pascal Greggory, dans la parfaite récitation d'un texte sublime, où se mêlent le mystère d'une transaction, l'amour physique, l'urgence de la mort. Jamais vu une telle précision, au centimètre: le duo de ces corps était une danse. L'alternance de leur voix, une polyphonie. Monsieur Chéreau, vous étiez un homme unique. Merci.