Merck Serono: tous dépassés!

EMPLOIS • A l'heure où les employés se mobilisent, il convient de tout entreprendre pour les aider à retrouver du travail. Les politiques, hélas, apparaissent au mieux comme d'impuissants spectateurs. Au pire, comme des commentateurs déplacés.

  • La fermeture du site genevois est un coup très dur pour l'économie genevoise.

MOBILISATION - La fermeture du site genevois de Merck Serono, avec les centaines de suppressions d'emploi annoncées, est un coup très dur pour l'économie de notre canton. On a déjà beaucoup parlé de l'intérêt des actionnaires prévalant sur l'intérêt du travail. Ou encore du départ, décidément au bon moment, d'Ernesto Bertarelli, vendant son entreprise au meilleur prix, il y a quelques années. Pierre-François Unger a parlé de tsunami. Les employés, via le syndicat, ont entamé une importante mobilisation. Les firmes Index Ventures et Eclosion, basées à Genève, vont aider les employés licenciés à se reconvertir. Un effort collectif évidemment capital. Mais qui n'empêche pas quelques réflexions sur l'impuissance du politique, son rôle de spectateur, à quoi s'ajoutent les dérapages verbaux de certains, et surtout le grave défaut de culture économique, révélé par certains discours d'élus.

BOULETTE - Car Sandrine Salerno, oui, a bel et bien parlé de «cols blancs». Comprenant très vite qu'elle avait dit une bêtise, elle a passé des heures à tenter de corriger ses propos. Col blanc: vieille vengeance de classe, datant de l'époque - totalement révolue - où le parti de Mme Salerno représentait encore les classes laborieuses, le bleu de travail, les mains de cambouis. Alors qu'aujourd'hui, miroir des classes moyennes, il a vu blanchir les cols de ses adhérents, se manucurer les ongles, s'alléger les âmes jusqu'à l'immatériel. Elle a parlé trop vite, Mme Salerno, et même en corrigeant, n'a pu s'empêcher de sortir les vieilles orgues de Staline contre les multinationales, l'attraction fiscale, toutes choses dont l'économie genevoise, en années de vaches grasses, et avant ce drame en effet très douloureux, s'était parfaitement contentée. Bref, le bon vieux discours de gauche, diabolisant, tellement facile.

ANTICIPATION - Son collègue Pierre Maudet n'a pas fait mieux. Tombant sur le conseiller fédéral chargé de l'économie, Super-Maudet se dit prêt à prendre l'avion pour Darmstadt, où personne ne l'a invité. Une gesticulation qui suinte trop la campagne du 17 juin. Président du Conseil d'Etat et ministre de l'Economie, Pierre-François Unger a certes su dire, dès le soir du tsunami, la colère d'un canton. Il a passé un savon, au soir du vendredi 27 avril, à un membre du directoire chargé de la pharmacologie. Il a pris contact avec le conseiller d'Etat vaudois Philippe Leuba, qui a œuvré dans le règlement de l'affaire Novartis. Il se démène pour secouer le monde des sciences de la vie. Tout cela, oui. Mais on se dit tout de même que ses services, sa promotion économique, ses têtes auraient pu être un peu plus chercheuses en termes d'anticipation de la secousse tellurique.

RÉPONSES - Dans cette affaire, les fusibles ont sauté. Au premier chef, François Naef, président du Conseil d'administration, ne pouvait décemment demeurer à la tête de la Chambre de commerce et d'industrie de Genève: il en a tiré les conséquences. Mais le politique, à Genève, au sens large, a-t-il vu venir la crise? Ne doit-il pas, d'urgence, se doter d'instruments d'analyse et d'anticipation? Au-delà des dérapages à la Ville et de la bonne volonté du Canton, ces questions-là, vitales, doivent très vite obtenir des réponses.