PLR: le putsch raté contre les vieux sages

GRAND CONSEIL • Que le bras droit d'un ministre se mêle du choix de la future députation, en régime de séparation, c'est déjà limite. Lorsqu'il le fait pour éliminer de la future législature d'excellents ténors ayant pour seul tort d'avoir refusé le budget, cela devient une affaire. Nous vous la racontons.

  • Les députés Pierre Weiss, Renaud Gautier et Ivan Slatkine sont dans le collimateur du bras droit de François Longchamp.

    Les députés Pierre Weiss, Renaud Gautier et Ivan Slatkine sont dans le collimateur du bras droit de François Longchamp.

  • Les députés Pierre Weiss, Renaud Gautier et Ivan Slatkine sont dans le collimateur du bras droit de François Longchamp.

    Les députés Pierre Weiss, Renaud Gautier et Ivan Slatkine sont dans le collimateur du bras droit de François Longchamp.

  • Les députés Pierre Weiss, Renaud Gautier et Ivan Slatkine sont dans le collimateur du bras droit de François Longchamp.

    Les députés Pierre Weiss, Renaud Gautier et Ivan Slatkine sont dans le collimateur du bras droit de François Longchamp.

L'affaire est sortie sur Léman Bleu, le mercredi 19 décembre 2012: le bras droit du conseiller d'Etat François Longchamp a tenté d'écarter de la course au Grand Conseil plusieurs députés sortants, ayant déjà à leur actif trois législatures. Clairement visés, certains des meilleurs députés de la République, les plus expérimentés, des gens comme Pierre Weiss, Renaud Gautier ou Ivan Slatkine, surtout coupables en réalité d'avoir été parmi les mousquetaires anti-budget 2013. Un refus du projet de budget, en plénum, qui avait fait perdre ses nerfs à François Longchamp. L'affaire est grave. Elle implique le bras droit de l'exécutif dans le choix du législatif, ce qui n'est déjà pas normal. Elle démontre surtout l'emprise grandissante d'une clique, peut-être le prélude à l'exercice, entre 2013 et 2018, d'un pouvoir personnel.

POUVOIR DE L'OMBRE
Le bras droit de François Longchamp s'appelle Bernard Favre. Secrétaire général adjoint du Département, il est l'homme de confiance du conseiller d'Etat. Un être brillant, travailleur, loyal, sur lequel le magistrat peut compter en toutes circonstances. Un homme, surtout, qui joue un rôle politique majeur, n'hésitant pas à sortir du cadre de ses fonctions, comme lorsqu'il avait qualifié de «flibustiers» les grévistes de l'aéroport. Ce que nous avons intercepté, c'est un courriel de sa part, envoyé le 27 novembre 2012 à la Commission des listes du Grand Conseil, chargée de choisir les futurs candidats, dont il était membre. Dans ce message, il défend l'idée de refuser aux personnes concernées une quatrième législature. Très grave, il estime qu'il faut faire fi de la décision de l'organe souverain du parti, l'Assemblée des délégués: «Ce n'est pas parce que notre Assemblée n'a pas eu le courage de voter cette disposition dans les statuts que ces derniers nous interdisent de l'appliquer». En clair, il existerait des instances supérieures à celles définies comme telles par les statuts du parti. Cela s'appelle le pouvoir de l'ombre.

VENGEANCE
D'après nos sources, le parti ne s'est pas laissé faire. Et M. Favre a dû, comme on dit dans les communiqués de guerre, se replier sur des positions préparées à l'avance. Mais l'affaire révèle plusieurs choses. D'abord, que vient faire le conseiller d'un Prince exécutif dans les affaires du législatif? Franchement dit, il n'avait pas sa place dans une telle commission. Ensuite, connaissant sa proximité, sa loyauté avec le conseiller d'Etat, il est inimaginable qu'en s'attaquant clairement à MM Slatkine, Weiss et Gautier, il ait agi seul. Entendez autrement qu'avec l'aval de son chef, pour se venger de l'affaire du budget, surtout avoir dans la législature 2013-2018 des députés à sa botte.

L'HOMME FORT
Inquiétant, parce que le conseiller d'Etat en question, assurément un ministre compétent, pourrait bien devenir l'homme fort de la prochaine équipe gouvernementale. Très fort, voulant tout contrôler, ayant placé les siens partout. Trop fort? Poser la question, c'est y répondre. Sans contre-pouvoir à ces procédés, Genève s'achemine doucement vers un pouvoir personnel. Ou tout au moins, l'exercice personnel du pouvoir.