Quartiers populaires, gourmettes et chevalières

COMMENTAIRE - Singulier dimanche que ce 17 juin 2012! D'un côté, la victoire de Pierre Maudet, nette et cinglante, donnerait à penser que l'Entente aurait retrouvé toute son lustre d'antan. Comme si rien, depuis 2005, ne s'était passé. Comme si la percée, puis l'ascension, du MCG n'étaient qu'un cauchemar passager, et qu'on ne tarderait pas à se réveiller. Grande illusion que tout cela! Deux éléments, objectifs et mesurables, le prouvent.

D'abord, la confirmation de la puissance du MCG dans les grandes communes suburbaines populaires que sont Vernier, Meyrin, Onex et Lancy. Ça n'est plus une tête de pont, c'est une véritable – et sans doute durable – implantation dans des quartiers démographiquement féconds, où une partie de la jeunesse est acquise aux idées d'Eric Stauffer. Que les patriciens de la rue des Granges, aussi désabusés que fatigués, avec leurs chevalières et leurs gourmettes, refusent de voir cette vérité qui leur flanque de l'urticaire, ou encore les propriétaires de villas de Veyrier, est une chose. Que le parti socialiste, et avec lui la gauche, commencent à perdre pied en ces terres-là, est autrement significatif.

Ensuite, il y a cette votation, un peu éclipsée par le maelström Maudet, sur la gouvernance des régies publiques. C'est une victoire de la gauche, du MCG et des syndicats. Et c'est un désaveu pour le Conseil d'Etat, et sa très obédiente majorité parlementaire, celle qui fait servilement tous ses caprices, et peut compter, de plus en plus, sur la très diligente collaboration des Verts. Clairement, les Genevois se sont méfiés d'un mode de désignation des administrateurs où le Conseil d'Etat, dans l'arbitraire, placerait ses affidés et ses copains. Le corps électoral a préféré maintenir une représentation équitable des partis politiques. A coup sûr, il a bien fait: il existe, dans ce collège-là, un ou deux ministres particulièrement portés sur les nominations d'accointances. Il convenait de leur montrer une limite.

On mesure, à ces deux indices, à quel point la victoire de Maudet est celle de sa personne, son charisme, la récompense d'une époustouflante campagne de terrain. Mais pas nécessairement la victoire des idées de l'Entente. Prochain rendez-vous: dans seize mois.