Soutenons l'École, pas les boycotts!

TRADITION • Boycotter les fêtes de l'Escalade, dans certains Cycles d'orientation, à quoi cela rime-t-il? Comment des enseignants (un tout petit groupe?) peuvent-ils à ce point se tromper sur les méthodes pour faire valoir leurs revendications? Chronique d'un autogoal.

  • Priver les enfants de marmite pour faire entendre ses revendications est une erreur.

    Priver les enfants de marmite pour faire entendre ses revendications est une erreur.

Un boycott incompréhensible. Un autogoal. Un signal qui va se retourner contre eux, contre l'image des enseignants à Genève. Un comportement autodestructeur. Le projet de quelques maîtres du Cycle d'orientation, notamment à Drize, de boycotter les activités festives traditionnellement organisées autour de l'Escalade, constitue une erreur tactique et stratégique sans précédent. Il émane d'un quarteron de syndicalistes qui semblent vivre dans un monde fermé, sans la moindre notion de la situation économique et financière du canton. Comme si de rien n'était. Comme si tout leur était dû. Comme si le salaire, qui tombe à la fin du mois, était une manne pour l'éternité. N'était pas à mettre en adéquation avec la bonne santé de l'Etat. Dans quel monde vivent-ils?

BON BOULOT Rappelons d'abord l'essentiel. Les enseignants, à Genève, dans leur immense majorité, font du très bon boulot. Ils ont choisi ce métier difficile mais passionnant, il faut leur rendre hommage, ils sont les vecteurs du savoir et de la transmission, sans doute le plus beau métier du monde. Reconnaissons aussi que leur tâche est beaucoup plus rude que par le passé, certaines classes sont difficiles, les effectifs plus nombreux, certains parents sont devenus insupportables par leurs constantes remises en question, lorsque ce ne sont pas des plaintes juridiques. Nous, les citoyens, devons dire aux enseignants que nous les comprenons, que nous sommes avec eux.

TROP GÂTÉS Avec eux, oui. Mais pas nécessairement avec ce pronunciamiento de syndicalistes de gauche, en mal de notoriété, dont on peut se demander s'ils ne représentent pas qu'eux-mêmes. Sont-ils vraiment suivis? Tous les maîtres ont-ils vraiment été consultés? N'ont-ils pas saisi cette aubaine pour réussir un coup médiatique? Et c'est justement la limite de leur démarche. Boycotter, ou faire la grève, n'a de sens que pour mettre de son côté l'opinion publique, qui ferait ainsi pression sur les décideurs politiques du budget (le Parlement). Là, nos boycotteurs, hélas pour leur cause, se trompent. Il n'est pas sûr, mais alors vraiment pas, que la population de ce canton, en ce mois de décembre 2012, soit disposée à prêter une oreille très attentive aux revendications d'une fonction publique jugée déjà trop gâtée. Si en plus on vient leur parler de boycott!

COMBAT CITOYEN Dommage, oui. Parce que la cause défendue par les enseignants mérite d'être entendue. Ils ne se battent pas, cette fois, pour leur salaire, mais pour une certaine conception du service public. Leur combat est donc davantage citoyen que corporatiste. Et leur colère sur les effectifs qui grimpent devrait être aussi la nôtre à tous: parents, nous avons tous intérêt à de bonnes conditions d'enseignement. Ce qui ne va pas, au Département de l'instruction publique, et continue de ne pas aller après les premières coupes, c'est l'hypertrophie des états-majors. Il y a encore trop de monde dans l'intendance, au détriment du «front». Et le front, dans ce métier-là, point n'est besoin d'avoir lu les superbes lignes de Péguy pour s'en convaincre, c'est le rapport direct entre le maître et l'élève. En résumé, soutenons les enseignants, tout en condamnant des actes puérils comme les boycotts. L'Ecole genevoise, cette grande institution, mérite mieux que ces enfantillages.