Traversée du lac: on se fout du monde!

POINT MORT • Les Genevois vont-ils devoir faire une croix sur la traversée du lac? Berne, en l'état, n'y croit pas, et ne financera donc pas. Comment en est-on arrivé là? Le projet a été mal défendu! Et certains, prétendant le soutenir, n'y croyaient pas vraiment. Chronique d'en rendez-vous manqué avec l'avenir.

  • Pour Berne, la traversée de la rade n'est pas une sollution pour désengorer Genève.

    Pour Berne, la traversée de la rade n'est pas une sollution pour désengorer Genève.

La traversée du lac - la grande traversée, avec franchissement autoroutier - ne se fera pas avant le milieu du siècle, pour peu qu'elle se fasse jamais. On nous avait promis 2030, puis 2040, on nous parle aujourd'hui de 2050, et encore on n'en sait rien du tout! Il a suffi qu'un Monsieur de Berne vienne refroidir la Commission des transports du Grand Conseil pour qu'un climat de deuil, chez les partisans, vienne s'installer. Pour toute une génération, c'est l'assurance de ne jamais voir de pont de son vivant. Comment a-t-on pu en arriver là? Qui nous a trompés? Ces questions méritent d'être posées.

MAUVAISE SOLUTION
Car il y a un sale mélange, dans toute cette affaire. Entre le jeu de dupes de certains, faisant semblant d'adhérer au projet tout en le laissant s'engluer, et l'incompétence de presque tous, nos différentes délégations à Berne n'ayant jamais vraiment réussi à convaincre les autorités fédérales. Le Monsieur de Berne, c'est un spécialiste de l'Ofrou (Office fédéral des routes). Début septembre, il est venu dire, à Genève, dans son langage à lui, que la traversée du lac, pourtant définie comme objectif par le Conseil d'Etat, n'était pas la bonne solution pour désengorger l'autoroute. Berne considère que la traversée débouche, côté sud, en rase campagne, ce qui, pour le moins, dénote une méconnaissance crasse de l'agglomération d'Annemasse et alentours. Apparemment, pour les apparatchiks bernois, la carte de Suisse s'arrête net à la frontière.URGENT BESOIN Pourquoi est-ce une catastrophe? Parce que Genève a le plus urgent besoin, non seulement de l'actuelle autoroute de contournement, même élargie d'une voie, mais d'un réel périphérique, qui puisse garantir les besoins de déplacement des générations futures. Désengorger non seulement le pont du Mont Blanc (ce que ferait déjà la Petite Traversée de l'UDC), mais l'ensemble de la Ville et des communes avoisinantes. Notamment Carouge et Thônex. Et plein d'autres.

CEVA PRIORITAIRE
Seulement voilà. Certains responsables du dossier, comme M. Cramer, ont préféré mettre tout le paquet, il y a une décennie, sur le CEVA (liaison Cornavin - Eaux-Vives - Annemasse), dont le chantier a justement commencé et rend totalement impossible, par exemple, pour de longs mois, toute idée d'entrer à Carouge, aux heures de pointe, ou d'en sortir. Ce CEVA, donné par le consensus se partageant aujourd'hui le pouvoir comme un Sésame, à quoi servira-t-il vraiment? A qui, surtout? Alors évidemment, les milliards du CEVA ajoutés aux milliards de la traversée du lac, pour Berne, ça commence à faire beaucoup, et même franchement trop. Ceux qui ont joué le CEVA en prétendant soutenir la traversée, ils n'ont pas joué double jeu?

IMBROGLIO TOTAL
A cela s'ajoute la Discorde chez l'ennemi, pour reprendre le titre de l'excellent ouvrage du colonel de Gaulle. Une droite divisée. Les uns, pour la traversée du lac (la grande), les autres voulant revenir au projet de petite traversée (la Rade), du type de celui que le peuple a refusé il y a une quinzaine d'années. Résultat: le bordel. Le pataquès. L'imbroglio total. Une Genevoiserie de plus. Très grave, celle-ci, parce qu'elle affecte la génération de nos enfants et de nos petits-enfants. Merci Messieurs.