Affaire d'agression qui dérange le Parquet

JUSTICE • Une quadragénaire s'était fait massacrer dans une boîte de la Vieille-Ville en 2009. Le procureur général Olivier Jornot instruit à nouveau ce dossier qui allait être classé.

  • Valérie a fait attester ses blessures auprès de Genève-Médecin.

    Valérie a fait attester ses blessures auprès de Genève-Médecin.

La semaine dernière, le procureur général Olivier Jornot a instruit un dossier qui avait traîné durant trois ans dans les tiroirs de la justice. L'affaire datait de l'ère de son prédécesseur Daniel Zappelli. Etrangement, l'instruction avait été subitement interrompue sans explication. Fin août de cette année, alors qu'elle était sur le point d'être classée, une des victimes a signalé au procureur général, que la justice n'avait pas fait toute la lumière pour prétendre à un classement. Plus précisément, toutes les auditions de témoins ne figuraient pas dans la procédure. «J'ai surtout l'impression qu'on a voulu enterrer cette affaire car elle concerne un gardien de Champ-Dollon», s'indigne la plaignante.

En boîte

Quelle est cette affaire qui a été jusqu'ici tenue «placardisée»? Elle date de 2009. Le 6 novembre, Valérie, quadragénaire, sort avec des amies. La virée entre filles se termine dans une boîte de nuit en Vieille-Ville. «Nous dansions sur la piste, il y avait un monde fou, témoigne Valérie. Soudain, j'ai trébuché et je suis tombée. Un homme a tendu les mains pour m'aider à me relever. Mais en même temps, il a baissé sa braguette! Comme il tirait mon visage vers son sexe, je me suis débattue, j'ai crié! Les coups sont partis tous azimuts et l'homme m'a envoyé une droite au visage. J'étais ko, la tête ensanglantée.»Dans la boîte, personne n'est intervenu. Seules les amies de Valérie lui ont porté secours jusqu'aux toilettes. L'homme est parti comme si de rien n'était: «Le videur l'a vu s'éloigner, poursuit Valérie. Mais il n'a pas vu ce qui s'était passé sur la piste de danse.»

Soins et plaintes

Valérie appelle Genève-Médecins à domicile pour se faire soigner. Le médecin constate des lésions traumatiques sur son visage avec photo à l'appui. Valérie dépose une plainte: «Par la suite, j'apprends que l'homme qui m'a frappée a, à son tour, déposé plainte contre moi pour agression!» Une première audition d'instruction a lieu en 2009. «Il a raconté qu'il voulait juste rigoler en simulant une fellation. Et s'il m'a cognée en plein visage, c'est parce que je lui donnais des coups! Or, je me défendais, car je ne voulais pas me retrouver en position de fellation!» L'accusé n'ayant pour l'heure pas de défense, nous n'avons pas pu avoir sa version des faits.

Silence radio

Suite à cette audition de 2009, Valérie n'entend plus jamais parler de l'affaire: «J'étais étonnée, mes huit amies présentes lors de l'altercation n'ont pas été auditionnées, ni même le videur! Ce n'est que fin août dernier, que j'ai j'appris par le Ministère public, la prochaine clôture de l'instruction.» Son avocat, Me Sébastien Voegeli, s'est alors empressé de faire savoir au procureur général les failles de ce dossier. «A ma demande, le Ministère public va procéder à l'audition de différents témoins qui, malgré la longueur de la procédure, n'avaient jusqu'alors pas été entendus», relève-t-il.

Retour à l'instruction

Le Ministère public confirme que le procureur général instruit à nouveau cette affaire depuis fin septembre. «La plainte concerne des lésions corporelles», détaille Sophie Bernard, porte-parole du Ministère public. Cette dernière tient aussi à clarifier que, pour le procureur général, la profession de gardien de prison n'entre pas en considération dans la procédure, l'homme étant de surcroît en congé au moment des faits.