Opération Papyrus: en un an, 1093 clandestins régularisés

SANS-PAPIERS • A mi-parcours, le magistrat Pierre Maudet tire un premier bilan positif du dispositif pilote mis en place à Genève. Explications.

  • Le conseiller d’Etat Pierre Maudet s’est beaucoup investi dans l’opération Papyrus.GIM

    Le conseiller d’Etat Pierre Maudet s’est beaucoup investi dans l’opération Papyrus.GIM

«Le dispositif fonctionne tant sur le plan humain qu’économique», résume le conseiller d’Etat Pierre Maudet. Le chef du Département de la sécurité et de l’économie (DSE) s’est beaucoup investi dans l’opération Papyrus, le projet pilote de régularisation des clandestins travaillant depuis de nombreuses années dans le canton. «Depuis son lancement en février 2017, 1093 personnes ont régularisé leur situation. Dans le détail, 244 familles dont 374 adultes et 412 enfants, 8 couples sans enfants et 291 célibataires ont obtenu un permis de séjour. Les gens dont nous parlons sont là depuis de nombreuses années, ils existent, travaillent, contribuent à la production de richesses mais n’ont pas d’existence légale, souligne Pierre Maudet. Il s’agit de mettre fin à une hypocrisie et de permettre à ces personnes vulnérables de sortir de la précarité.»

Vies bouleversées

Sur le terrain, l’opération Papyrus, menée avec syndicats et associations actives dans la défense des droits des étrangers, a suscité un espoir gigantesque. «Au 31 janvier, nous comptabilisons plus de 4500 consultations et 3000 personnes reçues», résume ainsi Marianne Halle, du centre contact Suisses-Immigrés. Avant de préciser: «Aujourd’hui, près de 75% de ces personnes sont dans la cible. Sans surprise, elles proviennent principalement d’Amérique latine 42%, du Kosovo et d’ex-Yougoslavie 19% et des Philippines 16%. Dans un premier temps, notre travail a consisté à les rassurer. Nous devions faire taire les rumeurs, certains voyaient dans l’opération un piège. Ensuite, il a fallu constituer des dossiers souvent complexes et les accompagner jusqu’au bout de la procédure. Il faut voir à quel point cette régularisation a changé la vie de nombreuses personnes», pointe-t-elle avec émotion.

Travail au noir

Autre axe prioritaire du projet, assainir des secteurs de l’économie particulièrement touchés par le travail clandestin. Sans surprise, celui de l’économie domestique se taille la part du lion devant l’hôtellerie-restauration et la construction. «Sur les 552 dossiers contrôlés, les deux tiers concernent l’économie domestique», note Christina Stoll, directrice générale de l’Office cantonal de l’inspection et des relations du travail (OCIRT). Qui pointe aussitôt les résultats notables obtenus dans la lutte contre le travail au noir et la sous-enchère salariale dans ce secteur. «Les adhésions à Chèque Service ont augmenté de 36%. La masse salariale cumulée est passée d’environ 52 millions en 2016 à 61 millions en 2017. Cela représente 2 millions de charges sociales en plus par an. Globalement, on peut dire que les employeurs collaborent.» Ils ont d’ailleurs encore quelques mois pour le faire, après le volet répressif reprendra de plus belle.

Pour mémoire, l’opération Papyrus se poursuit jusqu’à la fin du mois de décembre 2018. Au final, ce sont entre 2000 et 2500 clandestins qui pourraient être régularisés à Genève. Un canton qui, selon les estimations du Secrétariat d’Etat fédéral aux migrations (SEM), compterait près de 13’000 clandestins.

Critères de régularisation

Pour régulariser leur situation, les ressortissants clandestins provenant des pays hors Union européenne ou hors Association européenne de libre-échange, doivent remplir les conditions suivantes:

• avoir un emploi;

• être indépendant financièrement;

• prouver un séjour continu de cinq ans au minimum pour les familles avec enfants scolarisés et 10 ans pour tous les autres;

• avoir une intégration réussie (un niveau de français correct);

• justifier une absence de condamnation pénale.

L’échec d’une demande aboutira à un renvoi du pays. Il est conseillé aux sans-papiers de se renseigner auprès des permanences mises sur pied par les organisations actives dans la défense des droits des étrangers.