«Y en a marre de cette bande de Maghrébins toxicomanes agressifs. Ils poussent, bousculent et passent devant tout le monde pour bouffer», lance Maria*, une habituée de la distribution alimentaire dans le petit parc Galiffe à Saint-Jean. Avec une soixantaine de personnes dans le besoin, elle bénéficie de cette aide précieuse, deux fois par semaine. C'est l'association Café Cornavin qui soutient les exclus, dont les rangs ne cessent de grossir.
«Jambon de cochon!»
Cette fringante quinquagénaire prépare aussi des petits sandwiches pour ses camarades de fortune. Des cabossés de la vie, vieux et jeunes confondus, d'ici et d'ailleurs. Ce mercredi, un des «trublions» tend la main. Maria lui précise que «c'est du jambon de cochon». Sans un regard pour elle, il s'empare du sandwich et veut jeter la charcuterie. «Non, mais ça se fait pas, hurle-t-elle en le reprenant juste à temps. Une autre dame, une retraitée italienne qui n'arrive plus à joindre les deux-bouts, se met aussi en colère. «Ce n'est plus possible des choses comme ça. J'ai trimé dur à Genève depuis toute jeune… Eux, ils ne sont pas d'ici et ils n'ont jamais travaillé!»
Envie de frapper!
Cette soirée est animée. Le «clan» se fout des conventions. Lorsqu'il y a la queue pour la distribution des restes de cantines genevoises, les lascars se postent, ni une, ni deux, devant les réchauds proposant calamars, blé et crêpes fourrées. Et reviendront à trois reprises se réapprovisionner. Sous les yeux médusés, mais résignés d'autres personnes démunies. «Ce soir, ça va, tempère Maria. Il y en a assez. Mais ce n'est pas toujours le cas!» Un d'entre eux, fâché, va même tenter de lever la main sur elle.
Grande précarité
Le responsable de l'association regrette cette situation très tendue. «Ces gens dans une grande précarité sont en réelle augmentation, pointe Glenn Benoudiz. Malnutris, isolés, exclus, ils ont tout perdu. Nous répondons à des besoins existentiels, presque humanitaires. Nous adapter à chaque problématique n'est pas toujours évident.» Il se veut aussi rassurant: «La police, qui connaît le parc et ses habitués, fait des rondes de manière très régulière. Ce n'est pas bien de tout focaliser sur les Maghrébins, car beaucoup disparaissent à certaines périodes de l'année.» Glenn Benoudiz nous assure aussi «qu'à ce jour, il n'y a jamais eu de cas de violences physiques. Nous faisons, et ferons, très attention à ce qu'il n'y ait aucun débordement de ce type.» Maria et ses camarades d'infortune l'espèrent.