Justice: de l’affaire IOS au meurtre d'Adeline

Durant les cinquante dernières années, crimes et délits ont défrayé la chronique.

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Plonger dans les archives de presse des affaires judiciaires, c’est partir pour un voyage dans le temps captivant. Direction la Genève des sixties, «les années fric, des années de plein emploi. Tout était facile», raconte l’écrivaine Corinne Jaquet. Dans ce contexte, B. C., alias Bernie, pose cette simple question: «Voulez-vous sincèrement devenir riche?» Offrant des placements juteux, sa société IOS (Investors Overseas Services) fait rêver les investisseurs même les plus modestes. «Il avait acheté le château de Prangins ainsi qu’un château dans le Pays de Gex. Tout le monde se précipitait à ses réceptions», complète l’historien Bernard Lescaze.

Seulement voilà, dès 1970, le fonds d’investissement s’effrite. Des milliers de petits épargnants se retrouvent sur la paille. Bernie C. est arrêté en mai 1973 et libéré sous caution onze mois plus tard. Il est jugé en 1979. Assisté d’un bataillon d’avocats mené par Me Dominique Poncet et Me Marc Bonnant, il obtient l’acquittement.

Prise d’otages

21 mai 1974, la RTS diffuse en direct un improbable témoignage. Au bout du fil, une employée terrorisée de la Caisse hypothécaire de Carouge, prise en otage par deux braqueurs. «Qu’est ce qui se passe? interroge le journaliste. On est pris comme otage. Mais, dites à la police qu’ils ne tirent pas…» La télévision, installée sur le Rondeau de Carouge, diffuse, elle aussi en direct, les images du hold-up. «On avait les yeux rivés sur l’écran, se souvient Corinne Jaquet. On a même vu un policier rentrer dans l’établissement pour ravitailler les braqueurs… En slip pour qu’il ne puisse pas dissimuler une arme.»

Enlèvement de la fille de Frédéric Dard

Des années 1980, comment ne pas retenir l’enlèvement de la fille du célèbre écrivain français Frédéric Dard? Joséphine a 12 ans et demi quand, le matin du 13 mars 1983, ses parents découvrent sa chambre vide, au premier étage de leur maison de Vandœuvres. Elle ne sera retrouvée qu’une cinquantaine d’heures plus tard. L’auteur du rapt, un cameraman de 46 ans père de trois enfants sera jugé en 1984. «Il y avait plein de people au tribunal, tel que le metteur en scène et comédien Robert Hossein», se souvient celle qui débutait alors comme chroniqueuse judiciaire, Corinne Jaquet. Défendu par Me Dominique Warluzel, l’accusé est condamné à 18 ans de réclusion.

Décembre sanglant

L’année 1988 connaît un mois de décembre sanglant. Le 6, à la mi-journée, le corps d’une femme de 16 ans partiellement dévêtu et le visage écrasé est découvert au pied des falaises de Saint-Jean. Silvia, une jeune Portugaise, n’est jamais rentrée de sa journée de baby-sittings. «C’est cette affaire qui a déclenché, à Genève, la création d’un fichier ADN», précise Corinne Jaquet. Il contient toujours les traces relevées sur le corps de la jeune femme sans qu’on ait pu jusque-là remonter jusqu’à son meurtrier.

En décembre 1988 toujours, le dimanche 18, c’est sous le ponton de la Pointe-à-la-Bise qu’est découvert un gros sac rouge. Il renferme le corps nu d’une jeune fille de 18 ans, prénommée Adèle. Elle était l’assistante d’un dentiste. Et, aux yeux de la femme du médecin, sa maîtresse. Décidée à la faire avouer, l’épouse jalouse la shoote au chloroforme. Une anesthésie fatale... «Ironie de l’histoire, l’autopsie a révélé que l’assistante de 18 ans était vierge», lâche Corinne Jaquet.

Un gang corse à la manœuvre

Les années 1990 débutent, elles, avec une affaire rocambolesque: le casse du siècle. 25 mars 1990: cinq individus armés et gantés pénètrent dans le siège de l’UBS, passage des Lions, en plein centre-ville. Ils en repartiront sans laisser de trace avec 220 kilos de billets. Un butin record de 31,4 millions de francs en dollars, francs français et dirhams marocains. Derrière ce hold-up: le gang corse de la «Brise de mer» secondé par des employés de la banque. Mais aussi un professeur de sport franco-genevois, M. F., dont l’épouse travaille à l’UBS. Se présentant comme le «cerveau» du casse, ce dernier devient vite le dindon de la farce. Trahi par les Corses, il ne touche pas un kopek. Pire, il est dénoncé en échange de la prime proposée par UBS à quiconque aidera à mettre la main sur les malfrats.

Jugé en mai 1992 aux côtés de ses complices genevois, il passera sept ans et demi derrière les barreaux. On le retrouvera au début des années 2000 à la tête d’un vidéo-club genevois. Les Corses, eux, comparaîtront en 2004 et seront acquittés faute de preuve. Quant au butin, il s’est volatilisé…

Des assassins venus d’Iran

Le 24 avril 1990, l’opposant au régime iranien Kazem Radjavi tombe dans un guet-apens. Il est tué dans sa voiture, près de Coppet. Un crime perpétré par les services secrets iraniens. En témoigne la casquette déposée sur son corps. Une signature que porte aussi l’assassinat d’un ancien pilote militaire iranien, abattu aux Pâquis en août 1987, sous les yeux de son épouse enceinte.

Un banquier en combinaison de latex

Place aux années 2000. A Genève, le début du XXIe siècle est marqué par l’affaire Edouard Stern. Le banquier fortuné, ami de Nicolas Sarkozy, est retrouvé vêtu d’une combinaison en latex utilisée dans les pratiques sadomasochistes, abattu de quatre balles. «C’était à Villereuse, dans cet immeuble où il y a un commissariat de police au pied», note Bernard Lescaze. En 2009, l’amante du banquier, Cécile B., écope de 8 ans et demi de réclusion.

Meurtre d’Adeline

Autre meurtre retentissant à Genève, celui d’Adeline. Le 13 septembre 2013, le corps de la sociothérapeute est découvert dans un bois voisin du centre équestre de Bellevue. Attachée à un arbre et égorgée. Son meurtrier, un détenu qu’elle accompagnait pour une sortie équestre, est stoppé dans sa cavale le 15 septembre, à la frontière germano-polonaise. Finalement jugé en mai 2017, Fabrice A. est condamné à la perpétuité.

Années 2020...

En 2020, citons enfin, le procès du militant pro-climat du collectif Breakfree Suisse, jugé pour dommages à la propriété sur un bâtiment de Credit Suisse et finalement acquitté en appel. Ainsi que celui des jeunes Haut-Savoyards ayant tabassé cinq femmes à la sortie du Petit Palace un matin d’août 2018, condamnés en mai par le Tribunal correctionnel de Thonon.