«Dès la première vague, on a dû repenser notre manière de travailler»
Capitaine Alexandre Genolet, chef de la compagnie ambulances du SIS
L’alarme retentit simultanément sur leurs deux téléphones. Branle-bas de combat. Sur le champ, les ambulanciers du Service d’incendie et de secours (SIS) quittent leur bureau situé au premier étage et rejoignent le garage de la caserne principale, à Plainpalais. D’après les premières informations, l’intervention concerne un patient positif au Covid-19. L’équipement spécifique s’impose. En quelques secondes, la sapeuse ambulancière Marine Dubuis enfile la tenue de protection biologique, en sus du masque... Bientôt, on ne distingue plus que ses yeux derrière les verres embués de ses lunettes. Prête à partir au front.
«C’est nécessaire pour nous protéger et éviter la propagation du virus, mais, cela crée une barrière entre l’ambulancier et le patient», regrette-t-elle. «Le relationnel est prétérité alors que c’est une grosse partie du métier. En nous voyant arriver vêtus ainsi, le patient et ses proches se sentent comme des pestiférés», confirme le capitaine Alexandre Genolet, chef de la compagnie ambulances du SIS.
De nouveaux réflexes
On est loin en effet de l’image rassurante de celui ou celle qui porte secours et prodigue les premiers soins. Seulement voilà, le Covid-19 est passé par là. «Dès la première vague, on a acquis de nouvelles compétences, de nouveaux réflexes», précise le capitaine Genolet.
Au-delà de la tenue, c’est toute la procédure qui a été repensée. Des questions de base posées par le 144 à l’approche du patient. S’il s’agit d’un cas covid avéré ou suspecté, c’est désormais seul que l’ambulancier leader pénètre dans le domicile de la personne à secourir. «Dès cet instant, on va réfléchir à tout ce qu’on touche. Nos gestes sont extrêmement limités», commente Marine Dubuis.
Le second, lui, reste à la porte. Il est chargé de prendre note des réponses du patient, du résultat des premiers examens effectués par son binôme. Mais aussi de récupérer dans un sachet rouge tout objet contaminé tels le stéthoscope et le thermomètre utilisés ou encore d’appeler d’éventuels renforts.
Kit essentiel
Pour agir le plus rapidement possible et limiter la contamination du matériel, une petite pochette est désormais accrochée à l’énorme sac à dos. «Elle contient des masques de deux sortes, les traditionnels et les FFP2 qui ont un pouvoir de filtration plus important, détaille le capitaine Alexandre Genolet. Il y a aussi un thermomètre et une pince à satu qui permet de mesurer le rythme cardiaque et le taux de saturation dans le sang.» L’essentiel!
Dans la majorité des cas, les patients covid qui font appel aux ambulanciers souffrent de problèmes respiratoires aigus ou ont de la fièvre. Le malade installé, on prend la direction des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
L’arrivée aux urgences des HUG
Au garage, l’ambulance peine à trouver une place pour se garer. Les portes s’ouvrent, le brancard file vers l’ascenseur. «S’il s’agit d’un patient positif, avéré ou suspecté, on emprunte la filière bleue. Sinon, la filière verte», explique Marine Dubuis.
A l’étage, à la réception des urgences, la signalétique est identique. Le patient est transféré du brancard au lit hospitalier. Puis, une fois le rapport transmis à un médecin des HUG, les ambulanciers mènent le patient dans la pièce appropriée, avant de le laisser aux bons soins du personnel hospitalier.
Retour au garage pour récupérer le véhicule qui, entre-temps, a été désinfecté par les pompiers volontaires (lire encadré). Marine Dubuis réapprovisionne le sac en matériel, notamment avec une nouvelle bouteille à oxygène. Puis fait le tour de l’ambulance. Car, «la confiance n’exclut pas le contrôle», comme le répète souvent son collègue, le sergent-chef Jérôme Christinet. Il est temps de repartir à la caserne.
Ce jour-là, il n’y aura pas d’autres interventions avant la relève. «C’est vraiment très variable, souligne le capitaine Genolet. Un samedi, on a fait 17 interventions, dont 11 covid.» En attendant, pour Marine Dubuis, la journée s’achève. «On ne va pas se mentir, on en a tous marre de cette pandémie… Mais, nous, au moins, on n’est pas coupé du monde. Et on se sent utile.»
Plutôt indispensables!