Bio: la planche de salut des paysans genevois

Pour survivre, des agriculteurs se tournent vers le bio. Leur nombre a augmenté de 300% en dix ans Marges plus grandes et risques sanitaires moindres sont les principaux avantages. Reste une ombre de taille au tableau: une concurrence industrielle venue de l’étranger.

  • En 2016, le chiffre d’affaires national  des produits bio s’est élevé à 2,5 milliards  de francs.GETTY IMAGES/G-NAMENKO

    En 2016, le chiffre d’affaires national des produits bio s’est élevé à 2,5 milliards de francs.GETTY IMAGES/G-NAMENKO

«Economiquement, faire du bio est plus intéressant»

Thomas Läser, responsable du Domaine de l’Abbaye, à Presinge

En 2008, les paysans genevois misant sur le bio n’étaient que 13. En moins de dix ans, ce chiffre a augmenté de plus de 300%! Ils sont aujourd’hui une quarantaine, ce qui représente une surface de plus de 900 hectares dans le canton. Cet engouement s’explique par les difficultés croissantes (coûts de production qui flambent, bureaucratie en hausse, pression sur les prix) rencontrées par l’agriculture conventionnelle. Mais aussi par l’envie de trouver un sens à son travail: «On observe souvent une redécouverte du métier et la fierté de produire des denrées saines, précise Ania Biasio, responsable médias chez Bio Suisse, la fédération qui gère le label Bourgeon. De meilleurs prix et le renoncement aux pesticides de synthèse et autres engrais chimiques, sont également des avantages.»

Reconversion réussie

Au Domaine de l’Abbaye à Presinge, Thomas Läser n’a pas hésité longtemps. Quand il a repris l’exploitation familiale, il a tout de suite voulu miser sur le bio. Et il ne le regrette pas: «Cela fait deux ans que nous avons entamé une reconversion biologique. Nous avons dû adapter notre culture et donc notre façon de travailler. Economiquement, faire du bio est plus intéressant, mais cela nécessite aussi davantage d’heures de travail et du personnel supplémentaire. Au final, je suis heureux ainsi. Je crois en l’avenir car les gens veulent des produits sains.» Sa seule crainte? Que les exploitations se multiplient et que les prix finissent aussi par baisser, comme ce fut le cas dans l’agriculture conventionnelle.

Concurrence étrangère

Cependant, la possibilité de travailler avec des marges acceptables n’est pas toujours le principal moteur des paysans optant pour le Bourgeon. C’est d’abord la durabilité qui a poussé Sonia Sagon à devenir associée de la structure Cultures locales à Dardagny: «En choisissant de vendre des paniers de fruits et légumes bio, nous avons surtout opté pour la santé et l’environnement. Nous n’arrivons cependant pas encore à nous verser un salaire décent car la concurrence du bio étranger et industriel provoque un tassement des prix. Les consommateurs doivent être conscients qu’il faut favoriser la production locale car les produits sont de meilleure qualité.» Ce que confirme Ania Biasio: «Le cahier des charges Bio Suisse est plus sévère, plus complet et plus détaillé.» L’avenir des producteurs bio passera donc aussi par le choix des consommateurs de privilégier ou non les paysans genevois…