La réforme des pompiers entre dans le feu de l’action

  • Après des années de pourparlers, le projet de loi a été adopté mercredi 11 décembre par le Conseil d’Etat.
  • Le Service d’incendie et de secours (SIS) va changer de gouvernance et de mode de financement.
  • Cette réorganisation est indispensable vu la hausse de la population et l’évolution des risques. Notre dossier.

  • L’organisation du SIS remonte à 1972. Or, depuis, les risques ont beaucoup évolué.

    L’organisation du SIS remonte à 1972. Or, depuis, les risques ont beaucoup évolué. SERVICE D'INCENDIE ET DE SECOURS

«L’avantage de cette nouvelle gouvernance, c’est qu’on renforce la sécurité»

Guillaume Barazzone, conseiller administratif de la Ville de Genève chargé du Département de l’environnement urbain et de la sécurité

Feu, flamme! Le Service d’incendie et de secours (SIS) va être entièrement réorganisé. C’est ce que prévoit le projet de loi flambant neuf adopté mercredi 11 décembre par le Conseil d’Etat. «Le SIS reste le point fort, stipule Mauro Poggia, le magistrat chargé du Département de la sécurité, de l’emploi et de la santé (DSES). Mais, il acquiert une toute nouvelle stature.» Géré jusque-là par la Ville de Genève alors même qu’il intervient sur l’ensemble du canton (à l’exception de Céligny), le SIS va devenir un groupement intercommunal.

Intégration des communes

Qu’est-ce que cela change? Tout simplement que les municipalités vont avoir leur mot à dire. Parmi les neuf membres qui composeront l’organe exécutif, trois seront désignés par la Ville et les six autres seront élus par les autres communes. Autre changement majeur: les communes devront mettre davantage la main au porte-monnaie. La nouvelle clé de répartition financière prenant en compte la population et le nombre de places de travail à temps plein.

Il aura fallu des années pour arriver à ce résultat. Le rapport de la Cour des comptes préconisant la création d’une structure intercommunale remonte à 2011. Quant au dispositif actuellement en vigueur, il date de 1972. «Il était totalement dépassé, souligne le conseiller d’Etat Pierre Maudet, l’un des artisans de ce changement. Je suis aujourd’hui heureux de voir que la réforme aboutit, dans les lignes que j’avais proposées, soit avec un très net gain en termes de sécurité pour la population.»

Réduire les temps d’intervention

Car, tel est bien le but principal: améliorer les temps d’intervention. La conférence gouvernementale de la coordination suisse des sapeurs-pompiers préconise le respect dans 80% des cas des délais de référence. Soit dix minutes en milieu urbain et quinze minutes dans les zones à faible densité. «Aujourd’hui, ces délais sont respectés dans 60% des cas. Il faut que l’on soit plus efficace», insiste Mauro Poggia. D’où l’ouverture vingt-quatre heures sur vingt-quatre des deux autres casernes (en plus de celle des Bains) début 2020. Mais aussi le projet de deux nouvelles casernes: une du côté de Vernier - Meyrin et l’autre dans le secteur de Bernex-Plan-les-Ouates.

Pour atteindre tous ces objectifs, il fallait parvenir à un consensus autour du projet de loi. Un travail de longue haleine dans lequel se sont fortement investis les conseillers administratifs de la Ville de Genève, Sandrine Salerno et Guillaume Barazzone. «L’avantage de cette nouvelle gouvernance, résume le magistrat en charge du SIS, c’est qu’on renforce la sécurité. On permet à toutes les communes d’avoir une voix au chapitre et chacune d’elles financera le dispositif de manière équitable.»

Les pompiers volontaires restent

Toutes les communes auront un pouvoir de codécision. Ce dont se réjouit Xavier Magnin, président de l’Association des communes genevoises (ACG). «Le 14 juin 2019, on a réussi à obtenir une large adhésion en faveur de ce projet de loi. Aujourd’hui, on se réjouit de le voir enfin aboutir.» Une quasi-unanimité (une seule opposition) d’autant plus surprenante que certaines communes, d’après les projections, vont voir leur budget «incendie et secours» multiplié par trois ou quatre. Ce sera le cas à Plan-les-Ouates, la commune de Xavier Magnin. «On a su expliquer les enjeux et les intérêts de chacun», se félicite le président de l’ACG.

Mais aussi rassurer les municipalités inquiètes de voir leurs pompiers volontaires disparaître. Chargé de la relation avec les communes, le conseiller d’Etat Thierry Apothéloz estime que «la force de ce projet est aussi due à la marge de manœuvre laissée aux communes de conserver leurs spécificités et au respect à l’égard des corps de sapeurs-pompiers volontaires».

En effet, l’adhésion des pompiers volontaires dans le groupement intercommunal n’est pas obligatoire. Une disposition proposée par l’ACG qui a permis de lever bien des oppositions au sein de l’association.

«Maintenant, on ne peut que souhaiter que le Grand Conseil rejoigne cette grande coalition en faveur de ce projet», conclut en guise d’encouragement Xavier Magnin. La nouvelle organisation aura ensuite jusqu’à 2030 pour être totalement opérationnelle.

Des risques en pleine évolution

Depuis 1972, date de la création de l’ancien système, les risques ont fortement évolué:

• La hausse démographique.

• Le vieillissement de la population. Intervention pour les personnes âgées.

• L’évolution des loisirs, à l’image des baignades dans le Rhône.

• La densification urbaine, avec la construction de nouveaux quartiers comprenant des bâtiments de plus en plus hauts et de plus en plus profonds.

• L’impact des normes Minergie sur l’évolution du feu et la circulation

de la fumée dans les bâtiments.

• L’arrivée des nouvelles technologies telles que les véhicules hybrides.

• La mise en fonction des tunnels du CEVA.

• Les changements climatiques: orages, inondations...

• Le risque terroriste.

• Les risques dits NRBC: nucléaire, radiologique, biologique et chimique.