La vie rêvée de Cornavin

Pour le nouveau président de l'Union internationale des chemins de fer, les gares doivent devenir des lieux de loisirs.Cornavin suit ce chemin et retrouve petit à petit la lumière, devenant moins sombre et moins sale.Encore faut-il que les utilisateurs s'y sentent pleinement en sécurité, loin des toxicomanes et des pickpockets.

  • Danss le futur, on ne viendra plus à la gare seulement pour attraper un train.

  • Vladimir Yakunin.

Juin 2012. La petite ville de Merano, dans le Tyrol du Sud, en Italie, accueille une conférence internationale des chemins de fer sur le développement des gares. Un magnifique ouvrage, richement illustré, met l'accent sur des projets immobiliers innovants, des espaces verts, de grandes surfaces, et accessoirement sur des passagers embarquant dans des trains du futur. «Les gares, situées dans le centre des villes, doivent se transformer en lieux de socialisation et de loisirs», annonce Vladimir Yakunin, le patron des Chemins de fer russes. Proche de Vladimir Poutine, l'homme est à la tête d'un monstre, employant un million de salariés et transportant un milliard de passagers chaque année. Début, juillet, quelques jours après la conférence de Merano, Vladimir Yakunin est devenu président de l'Union internationale des chemins de fer (UIC). L'association, qui a son siège à Paris, regroupe les principaux acteurs du système ferroviaire dans le monde.

Une ville dans la ville

Quel rapport avec la gare de Cornavin, qui n'apparaît d'ailleurs pas dans l'ouvrage distribué à Merano? Tout simplement le fait que ce site – longtemps d'une saleté repoussante, sombre, sinueux, hanté par des sans-abri et des toxicomanes, royaume des petits voleurs – veut suivre le même chemin. Fréquentée chaque jour par 120'000 personnes, Cornavin rêve de devenir un lieu de vie. «Avec l'apport d'escalators, on arrive déjà en ligne droite depuis la rue du Mont-Blanc jusqu'à l'intérieur de la gare», souligne Frédéric Revaz, porte-parole des CFF. On ne viendra ainsi plus à la gare seulement pour attraper un train, mais aussi pour y déjeuner avec des amis, y faire ses courses, choisir un nouvel appareil photo ou du matériel de jardinage. Ce n'est pas un fantasme: les gares de Zurich et de Bâle sont déjà devenues de véritables villes dans les villes. Celle de Zurich compte plus d'une centaine de boutiques et réalise un chiffre d'affaires de 500 millions de francs par an. La rénovation de Cornavin doit permettre de gagner 600 m2, au profit des CFF et de l'implantation de sept nouvelles boutiques.La conférence de Merano ne parlait pas seulement d'ingénierie, mais aussi de «retour sur investissement». Il ne s'agit pas seulement d'ouvrir des magasins, les gares peuvent aussi organiser des concerts, accueillir des expositions, s'ouvrir à des artistes. Bref, la gare doit à la fois devenir «un lieu incontournable de la vie de la cité» et rapporter de l'argent. «A condition toutefois que l'on mette l'accent sur la sécurité et la sûreté», insiste le Russe Vladimir Yakunin, le nouveau président de l'Union internationale des chemins de fer (UIC).

Marginaux et délinquants

En effet, même le site le plus flamboyant ne vous séduira guère si vous devez vous frayer un chemin entre des groupes de marginaux et de délinquants. Récemment, les serveurs d'un restaurant place de Montbrillant ne cessaient de conseiller à leurs clients, assis à la terrasse, de ne jamais perdre de vue leurs affaires en raison des pickpockets. Se faire dérober son sac suffit à vous couper l'appétit, et à ne plus revenir, quel que soit le talent du cuisinier. Un aspect essentiel que les CFF ne veulent surtout pas négliger. Pour que Cornavin retrouve la lumière.

«La gare doit devenir un lieu incontournable de la vie de la cité»

Vladimir Yakunin, président de l'Union internationale des chemins de fer