«On m’a proposé de retirer le gain [fictif] en échange d’une somme de 10’000 francs»
Marie-Claire*
C’est bien connu: quand c’est trop beau, c’est du pipeau. Cette maxime, Marie-Claire*, une quinquagénaire habitant Champel, regrette encore de l’avoir oubliée un après-midi de juillet. Alors qu’elle se balade tranquillement dans son quartier, une jeune femme de type hispanique l’aborde: «Dans un anglais approximatif, elle m’a affirmé avoir coché les six bons numéros au Swiss Loto, mais vu qu’elle séjournait illégalement en Suisse, elle ne pouvait pas retirer le gain.»
Reçu sans valeur
Marie-Claire est d’abord dubitative. La passante sort alors de sa poche le présumé billet gagnant: «Au même moment, un homme s’approche en se faisant passer pour un Genevois alors qu’il roulait auparavant dans une auto avec des plaques espagnoles! Il dégaine son smartphone et me montre le dernier tirage de la loterie, les numéros étaient les mêmes que sur le billet!»
Ce que Marie-Claire découvrira plus tard, c’est que le billet en question était en fait un reçu que tout le monde peut se procurer auprès d’un kiosque et donc sans la moindre valeur. Mais l’histoire ne s’arrête pas là: «La jeune femme me propose ensuite de retirer le gain à sa place en échange d’une somme de 10’000 francs. Je lui réponds que je ne souhaite pas cet argent, mais que je peux l’aider à le récupérer. Elle m’affirme qu’il faut aller dans les bureaux de la loterie à la rue du Mont-Blanc.»
Très rapidement, le piège se referme: «Presque en larmes, elle me confie que si elle me transmet son billet gagnant, je dois lui fournir une garantie. De l’argent, des bijoux ou une montre de valeur. J’avais 5000 francs en cash chez moi et, comme une idiote, je suis allée les chercher pour les lui donner.» Heureusement, l’arnaqueuse commet une erreur. «Elle m’a demandé d’aller chercher des médicaments à la pharmacie. Je lui ai dit que je pouvais le faire uniquement si elle me redonnait mon argent.»
A ce moment-là, Marie-Claire a un éclair de lucidité et se rend compte de l’escroquerie. Elle ne se rendra jamais à la pharmacie, mais chez elle, encore stupéfaite d’avoir été si naïve, mais soulagée de n’avoir pas perdu ses 5000 francs.
Au sein de la police cantonale genevoise, cette affaire n’étonne pas: «Les malfrats s’adaptent et font preuve d’imagination pour inventer de nouvelles astuces afin d’obtenir du cash rapidement. Si l’affaire est trop belle, c’est que cela ne sent pas bon», explique un porte-parole. Avant de rappeler: «Il ne faut pas se laisser distraire par des inconnus. En cas de doute, il faut faire appel au 117 pour faire fuir un éventuel voleur et pouvoir fournir un signalement et une localisation afin que nous puissions interpeller et identifier le ou les auteurs. Enfin, se rendre dans un poste de police pour y déposer une plainte si l’on s’estime lésé.»
Jean-Luc Moner-Banet, directeur général de la Loterie romande, ajoute: «La majorité des tentatives recourt à la méthode dite du paiement à l’avance. Au bout du compte, le gros lot promis n’est jamais payé et les avances sont perdues. C’est pourquoi nous mettons en garde les joueurs au sujet des risques relatifs à ce genre d’arnaque et les exhortons à ne jamais répondre.» Et à passer leur chemin si cela se produit dans la rue…
* nom connu de la rédaction