Pollution: danger invisible dans le Léman

- L’analyse de l’eau du Léman a révélé une présence inquiétante de microplastiques.
- Aujourd’hui, l’Association pour la Sauvegarde du Léman (ASL) lance une étude pour déterminer leur provenance...
- ... et déterminer si ces plastiques rendent malade.

  • Filet pour prélever les microplastiques dans le Léman. En médaillon: échantillon de particules de plastiques retrouvées dans le lac. LABORATOIRE CENTRAL ENVIRONNEMENTAL (GR-CEL) EPFL

    Filet pour prélever les microplastiques dans le Léman. En médaillon: échantillon de particules de plastiques retrouvées dans le lac. LABORATOIRE CENTRAL ENVIRONNEMENTAL (GR-CEL) EPFL

  • Filet pour prélever les microplastiques dans le Léman. En médaillon: échantillon de particules de plastiques retrouvées dans le lac. LABORATOIRE CENTRAL ENVIRONNEMENTAL (GR-CEL) EPFL

    Filet pour prélever les microplastiques dans le Léman. En médaillon: échantillon de particules de plastiques retrouvées dans le lac. LABORATOIRE CENTRAL ENVIRONNEMENTAL (GR-CEL) EPFL

«Une part non négligeable de ce qui arrive dans le lac ressort dans le Rhône et va se jeter dans la Méditerrannée»

Suzanne Mader-Feigenwinter, secrétaire générale de l’ASL

On l’appelle le 7e continent. Lui, c’est le plastique, véritable fléau des mers qui sévit - bien que de manière beaucoup moins médiatique - également dans les lacs.

Cette absence d’information est en passe d’être réparée. L’Association pour la Sauvegarde du Léman (ASL) vient en effet de lancer une étude des sources potentielles de pollution du Léman par les microplastiques*.

L’étude va se limiter à dix affluents du lac (Rhône aval, Rhône amont, Venoge, Aubonne, Veveyse, Versoix, Dranse, Vion, Foron, Morges) pour tenter de répondre à cette lancinante question: d’où est-ce que les microplastiques proviennent? «Nous n’avons pas de réponse pour l’instant», concède Suzanne Mader-Feigenwinter, la secrétaire générale de l’ASL.

Une présence avérée

Cette étude poursuit celle du GR-CEL (Central Environnemental Laboratory) de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne. De juin à novembre 2013, l’EPFL a analysé l’eau de six lacs - Léman, Constance, Neuchâtel, Majeur, Zurich, Brienz (BE) -, ainsi que le Rhône genevois à sa sortie du territoire suisse, pour en déterminer la présence de microplastiques.

Résultats: «Bien que les concentrations mesurées ne constituent pas une menace directe pour l’environnement et la qualité de l’eau, la présence de plastique est avérée», explique Suzanne Mader-Feigenwinter.

Pollution insidieuse

Dans le Léman, ce plastique a été trouvé dans chaque échantillon prélevé sur les plages. Même s’il est trop tôt pour généraliser ce constat à l’ensemble du lac, «la quantité de débris s’est révélée comparable à celle observée en méditerranée», détaille pour sa part l’étude de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.

Déchets

Principal accusé, le polystyrène, même si l’on trouve également des plastiques durs, membranes et bribes de lignes de pêche. Du polystyrène (PS), du polyéthylène (PE) et du polypropylène (PP), qui constituent plus de la moitié des polymères récupérés. Des plastiques que l’on trouve dans les matériaux d’isolation ou encore les emballages de grande consommation.

Mais, alors qu’il serait facile d’incriminer tel comportement particulier ou telle industrie, Suzanne Mader-Feigenwinter nuance. «Il y a autant de déchets alimentaires que de goudron ou de polystyrène. Ce n’est pas si évident.»

Cadavres d’oiseaux

Ce qui est, en revanche, évident, c’est la conséquence pour l’environnement, faune incluse. Trois des quarante poissons examinés et huit des neuf cadavres d’oiseaux étudiés lors de l’étude «étaient contaminés par de petites quantités de microplastiques dans leur appareil digestif», conclut Suzanne Mader-Feigenwinter. Cette présence pose problème car, «en soi, il n’y a pas de raison que ces plastiques soient là. Pour autant, il ne faut pas arrêter de boire l’eau du robinet, grâce aux stations d’épuration qui limitent les rejets polluants dans l’environnement et de potabilisation de l’eau du lac très performantes.»

Après les hydrocarbures (lire encadré ci-contre, les microplastiques deviendront-ils une nouvelle menace pesant sur le Léman?

* plastiques de taille inférieure à 5 mm.

http://asleman.org/fr/

Truites de grande taille interdites à la consommation

BD • Depuis le 1er novembre, les truites du lac Léman de plus de 54 cm de long sont interdites à la vente et à la consommation. Une décision prise sur les préconisations des chimistes cantonaux de Genève, Valais et Vaud, qui fait suite à une restriction déjà en vigueur concernant les ombles chevaliers (salmonidés) de plus de 39 cm.

La raison de ces interdictions de consommation tient en un mot: polychlorobiphényls (PCB). Il s’agit d’hydrocarbures, jadis utilisés pour leurs capacités isolantes, classés comme polluants organiques persistants, qui seraient toxiques pour l’homme.

Des analyses effectuées en 2014 ont montré que chez certains spécimens de grande taille, les teneurs en PCB dépassaient la norme réglementaire en vigueur pour les denrées alimentaires.

A noter que les truites lacustres ne représentent que 1,5% du tonnage de pêche professionnelle dans le Léman. La consommation d’autres espèces de poissons (brochet, lotte, féras, perches), de truites de moins de 54 cm et d’ombles chevaliers de moins de 39 cm ne présentent pas de risque pour la santé.