Trafic de drogue: le deal, c’est si facile!

º Eradiqué le trafic de drogue? On en est loin.
º Certaines rues de la ville sont squattées par les dealers.
º Reportage en immersion nocturne.

  • Trafic de drogue: le deal, c’est si facile!

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    Trafic de drogue: le deal, c’est si facile!

Acheter de la  drogue à Genève est d’une facilité déconcertante. La preuve? Mercredi 9 octobre en début de soirée, accompagné d’un gros bras rassurant, nous avons arpenté les rues et venelles de la ville où, nous dit-on, il est aisé de se fournir en substances illégales. Aisé est un euphémisme.

Rue Voltaire
Notre parcours débute vers 21 heures du côté de la rue Voltaire, pas très loin de la gare Cornavin. Premier étonnement,  le square situé en bas du préau du collège, bien que grillagé depuis  les plaintes de voisins signalant de nombreuses incivilités liées au  deal, a son portail grand ouvert. Le lieu est toutefois désert. Il  pleut un peu. Nous nous rendons alors plus loin, le long de la voie de chemin de fer, sur une petite place située à deux pas des cabanons de l’Armée du Salut. 
Trois hommes d’origine maghrébine sont installés sur un banc, sous un arbre. Un est ivre mort. Le second a les yeux injectés de sang et le troisième écoute de la musique dans son casque. «Vous êtes de la police? demande l’amateur de musique, mais si c’est le cas, on s’en fout».

Shoot au parc, nuit à l’Armée du Salut
La conversation s’engage. On apprend qu’ils viennent du Maroc, d’Algérie et de Saint-Julien et concèdent que le parc voit régulièrement des toxicomanes se shooter par ici. Que font-ils là? «On attend que la lumière du parc s’ éteigne pour aller dormir à l’Armée du Salut», explique celui qui peut  parler. Le centre a 40 places et accueille chaque nuit des paumés,  pour 15 francs avec le petit déjeuner. Le lieu ne désemplit pas. «Seuls des étrangers y dorment», confie l’un des employés, et les personnes trop défoncées ou ivres n’y s’ont pas admises.

Jonction, Usine
Direction la Jonction. Aux alentours de l’Usine,  rue de la Coulouvrenière, rue du Stand, rue des Rois, rue de l’Arquebuse, on ne peut pas faire dix mètres sans être  apostrophé par un Noir africain. «Salut tu veux quelque chose, nous demande l’un d’eux dans un français approximatif, j’ai de la marijuana». Rien d’autre?  «Si j’ai de la poudre aussi». Non merci. On le quitte et nous rendons à l’intérieur de l’Usine pour nous réchauffer. Il pleut toujours. A l’étage, le bar est bien rempli. Le temps d’un café et d’une  cigarette (si si, on y fume), nous nous rendons avenue du Mail. 

«La réalité du trafic de drogue a de quoi donner froid dans le dos»

Plainpalais
A chaque coin de rue, ou presque, un dealer. S’il n’est pas pendu à son téléphone portable, il nous accoste. Avec toujours et encore les mêmes questions, précisant qu’entre 20 et 50 balles, on aurait ce que l’on veut. Mais combien sont-ils ces marchands de paradis artificiels ou de mort? Impossible de le dire précisément. Des dizaines, sans aucun doute, il est à peine 22 heures 30.
Changement de rive. A la rue du Mont-Blanc, les commerces sont fermés depuis longtemps. Le poste de police des Pâquis est à une centaine de mètres. 

Zone piétonne
Dans les coins de la zone piétonne, des groupes de jeunes hommes qui se cachent à peine, proposent sans gêne, dès que l’on s’approche, des boulettes de cocaïne. L’heure de Cendrillon approche. La rue de Berne est noire de monde.
La réalité du trafic de drogue, en ce milieu de semaine automnal et frisquet, a de quoi faire froid dans le dos. Et elle n’est rien à côté de l’animation du week-end. n
Les dealers, présents dans divers lieux de la ville, proposent sans gêne leur marchandise. Pascal bitz

Dealers et requérants

«L’immense majorité des dealers de rue sont des requérants provenant d’Afrique noire, confie un gendarme de terrain. Ils ne sont pas tous basés à Genève et proviennent souvent d’autres cantons où ils ont déposé leur demande d’asile. Ils se déplacent en train ou en bus, ayant pour la plupart des abonnements gratuits». Selon certaines estimations, ils seraient plus de 250 à vendre régulièrement leur drogue à Genève. Polices cantonale et municipale ont beau multiplier patrouilles et contrôles, le problème est toujours le même. Ils n’ont pas de papiers, présentent une fausse identité et possèdent rarement de grosses quantités de drogue sur eux. Lorsqu’ils sont interpellés, ils sont rapidement relâchés.