Voyage aux frontières de la mort

- Les expériences de mort imminente toucheraient 10 à 15% de la population.
- Un Institut genevois excelle dans ce domaine encore tabou.
- Sa directrice lève un pan du voile sur ces phénomènes qui bouleversent la vie.

  • Les personnes racontent souvent s’être retrouvées à l’extérieur de leur corps. ISTOCK/VOLKANKURT

    Les personnes racontent souvent s’être retrouvées à l’extérieur de leur corps. ISTOCK/VOLKANKURT

  • Les personnes racontent souvent s’être retrouvées à l’extérieur de leur corps. ISTOCK/VOLKANKURT

    Les personnes racontent souvent s’être retrouvées à l’extérieur de leur corps. ISTOCK/VOLKANKURT

«C’est un séisme dans une vie qui conduit à remettre tout en question»

Sylvie Déthiollaz, directrice d’Issnoe

Qu’est-ce que la mort? Vaste question… Et pourtant, certains d’entre nous l’ont frôlée de très près et racontent, comme François, un quinquagénaire genevois: «Ce que j’ai vécu ne m’a pas fait peur. Et pourtant, j’ai côtoyé la Grande Faucheuse suite à un accident de moto. Mon cœur s’est arrêté, j’ai eu la sensation de passer dans un tunnel et au bout j’ai vu une magnifique lumière blanche. Même si je me sentais bien, j’ai demandé à revenir pour m’occuper de mes deux garçons qui allaient être seuls si je mourais.» François réintègre immédiatement son corps. Et la vie. Avec ce sentiment étrange d’avoir vécu une expérience hors normes. «C’est effectivement le cas», explique Sylvie Dethiollaz, docteur en biologie moléculaire et directrice d’un lieu unique au monde: l’Institut suisse des sciences noétiques (Issnoe).

Mort imminente

Ce que François a traversé porte un nom: Expérience de mort imminente (EMI) ou Near Death Experience (NDE). Il fait partie des états modifiés de conscience (EMC) dits «non ordinaires». Et Sylvie Dethiollaz d’ajouter: «Les NDE sont en général vécues au seuil de la mort ou lors d’un coma. Les personnes rapportent souvent s’être retrouvées, comme François, dans une sorte de «tunnel», avoir rencontré des personnes décédées et baigné dans une lumière magnifique. Elles racontent aussi s’être retrouvées à l’extérieur de leur corps. C’est ce que l’on appelle une «sortie hors du corps» (OBE pour Out Body Experiences), que l’on peut aussi vivre dans toutes sortes d’autres circonstances. Lors d’une NDE, certaines personnes ont pu raconter en détail ce qu’elles avaient vu alors qu’elles étaient inconscientes, par exemple leur réanimation suite à un infarctus.»

Séisme dans une vie

Des expériences souvent stupéfiantes qui laissent des traces. «Les sensations éprouvées sont très éloignées de notre quotidien, précise Sylvie Dethiollaz. « C’est perturbant, car c’est un séisme dans une vie qui conduit à tout remettre en question: ses croyances, ses visions de la vie, de la mort, du monde, ses valeurs. Et comme le sujet est tabou, les gens n’osent pas en parler de peur de passer pour des «illuminés». Pourtant ces expériences ne sont pas rares. D’après différentes études scientifiques, elles toucheraient environ 10 à 15 % des personnes réanimées après un arrêt cardiaque.

Recherche et accompagnement

A l’Institut suisse des sciences noétiques, deux pôles se complètent (voir encadré): la recherche scientifique, mais également l’accompagnement des personnes confrontées à ce type de phénomène, grâce à Claude Charles Fourrier, psychothérapeute: «Certaines d’entre elles n’arrivent pas à se remettre d’une expérience passée, d’autres continuent à vivre des phénomènes perturbants. Notre approche comporte deux axes: un travail d’analyse pour comprendre ce que ces expériences leur apprennent sur elles-mêmes et sur leur fonctionnement et un travail sous la forme d’exercices simples pour reprendre pied dans leur vie .»

Réalité ou hallucination?

Du côté scientifique, existe-t-il des explications possibles? Sylvie Dethiollaz répond: «Nous n’avons pour l’instant aucune théorie scientifique qui permette d’expliquer tous les éléments de ces expériences très complexes. Aussi, elles mériteraient que le monde scientifique se donne enfin les moyens de les investiguer sérieusement. Mais nos propres recherches nous ont convaincus qu’il ne s’agissait pas simplement d’hallucinations.» Un Institut, essentiel à notre société et qui fait œuvre de pionnier.

Recherche et accompagnement

L’Institut Suisse des Sciences Noétiques (ISSNOE) est une Fondation reconnue d’utilité publique à but non lucratif. Il est né de la fusion en 2012 du Centre Noêsis (créé il y a 15 ans par Sylvie Dethiollaz) avec la Fondation Odier de psychophysique. Ses objectifs? Des travaux de recherche sur les états modifiés de conscience «non ordinaires», l’accueil et l’accompagnement personnalisé de personnes confrontées à ces phénomènes, à la mort et au deuil en général, mais aussi des groupes de parole mensuels, de l’information et des conférences. L’Institut organise aussi des réunions (intervisions) avec des professionnels de la santé (psychiatres, médecins, infirmiers, etc.). ISSNOE vit de dons et, nouveauté, dès le mois de septembre, les personnes qui le souhaitent pourront en devenir membre.

Infos: www.issnoe.ch