Dosage du PSA et cancer de la prostate: un monde d’incertitudes

  • L’information éclairée du patient doit être au centre de la décision de dépistage. 123rf/Vadim Guzhva

Tout homme de plus de 50 ans en aura au moins entendu parler et se le sera probablement vu proposer par son médecin. Le dosage sanguin du PSA (Antigène spécifique de la prostate, une protéine fabriquée par la prostate et dont la fonction est de fluidifier le sperme) est fréquemment utilisé comme outil de dépistage du cancer de la prostate, une maladie fréquente en Suisse où on dénombre en moyenne 6000 nouveaux cas et plus d’un millier de décès chaque année.

Autres anomalies possibles

Comme toujours, le principe du dépistage est évident et louable: détecter la maladie le plus tôt possible, alors que la personne ne présente aucun symptôme, permet logiquement d’améliorer ses chances de survie, voire même de guérison.
Pourtant, le dosage du PSA, malgré sa généralisation, est controversé. Lorsqu’il est bas, il indique avec une forte probabilité l’absence de cancer de la prostate. Mais élevé, il n’a pas de signification évidente. Ainsi, pour dix hommes qui font une biopsie après un taux de PSA élevé, trois seulement se verront diagnostiquer un cancer de la prostate. En clair, dans 70% des cas, un taux de PSA élevé n’est pas synonyme de cancer, mais d’autres anomalies, passagères ou chroniques du fonctionnement prostatique, comme une prostatite ou une augmentation bénigne du volume de cet organe. De fait, le PSA seul ne suffit de loin pas à poser un diagnostic de cancer de la prostate et doit absolument être complété par des examens complémentaires, dont l’incontournable biopsie. Plus problématique encore, une forte proportion des cellules tumorales qui seront éventuellement détectées (20 à 30%) ne se développeront pas, ou trop lentement pour modifier l’espérance de vie d’un homme.

Ablation parfois inutile

Opérer ce type de patients pour leur retirer la prostate et soigner leur cancer est donc strictement inutile, voire même nuisible en raison des nombreux effets secondaires induits et durablement subis (incontinence, troubles sexuels, etc.), le tout sans aucun bénéfice médical. Seulement voilà: il est à l’heure actuelle impossible d’identifier ces patients et de savoir, même a posteriori, quand l’ablation de la prostate aura été pertinente ou pas.
De là à conclure à l’inutilité du dosage sanguin du PSA, il n’y a qu’un pas, franchi par de nombreux médecins et les assureurs maladie, qui refusent de le rembourser. Afin de sortir de ces incertitudes, la Société suisse d’urologie a émis une série de recommandations, plaçant l’information éclairée du patient au centre de la décision de dépistage. Pour elle, pas question d’organiser un dépistage systématique chez les patients non informés où trop âgés dont l’espérance de vie ne serait de toute manière pas impactée par la survenue d’un cancer de la prostate.