Levons le voile sur le futur musée de Saint-Antoine

ARCHÉOLOGIE • Les fouilles entamées en 2012 en Vieille-Ville ont révélé des vestiges inédits remontant au Ier siècle après J-C. Reste à construire l’infrastructure qui permettra au public de découvrir ce site. Explications.

  • Si aujourd’hui les vestiges reposent sous d’immenses bâches en attendant la création du musée, les fouilles ont permis de révéler différentes strates d’occupation du site. SERVICE ARCHÉOLOGIQUE DU CANTON DE GENÈVE

  • Nathan Badoud, archéologue cantonal. MP

Que se passe-t-il derrière les palissades de chantier qui encerclent le site archéologique de l’esplanade de Saint-Antoine? Pour le savoir, rien de tel qu’une virée sur place, en Vieille-Ville, en compagnie de l’archéologue cantonal, Nathan Badoud.

Une fois le cadenas ouvert, on pénètre sous la structure métallique. A la lueur orangée de cette fin de journée, le lieu revêt un caractère mystique. Les précieux vestiges dorment sous d’immenses bâches afin d’être protégés en attendant la création du musée.

Un crédit de 14,6 millions

Le projet, porté par la Ville de Genève, s’élève à 14,6 millions de francs, dont 4,6 millions financés par le Canton, 4 millions par une fondation privée et un million par la Loterie romande. Le crédit en question doit justement être voté lors de la plénière des 25 et 26 janvier. Ayant fait l’unanimité en commission, il devrait être adopté sans débat.

Voilà pour le financement mais, à quoi ressemblera le futur musée? «Un bel équilibre a été trouvé entre l’espace d’agrément en surface et la plongée dans le passé. En se promenant sur l’esplanade, le passant verra sa curiosité piquée par la présence de trois lanterneaux. Ces puits de lumière donneront un aperçu de ce qui se cache sous ses pieds.» De quoi donner envie de pousser plus loin la découverte. «A l’image de l’archéologue qui, à mesure qu’il creuse, remonte le temps.»

Trois périodes d’occupation

Pour trouver quoi? «Ici, trois grandes périodes d’occupation, de la Renaissance jusqu’à l’Antiquité en passant par le Moyen-Age, ont été mises au jour, commente Nathan Badoud. Elles correspondent à trois types d’utilisation du site: militaire, religieuse et habitat. La plus récente est formée par les fortifications du XVIe siècle. On note la présence du mottet (bastion) de Saint-Laurent, construit en 1537, et celle d’un tronçon de rempart datant de 1560.»

C’est en dégageant la zone que les archéologues ont découvert un groupe de tombes, datées des IIIe et IVe siècles. «Les vestiges de l’église Saint-Laurent entourée de sa nécropole ont ainsi été mis au jour», indique l’archéologue cantonal. A noter que l’utilisation funéraire du site se poursuit jusqu’à la fin du XIIIe siècle, soit près d’un millénaire d’histoire funéraire. «L’étude des squelettes donne une idée de l’évolution de la population, de son organisation sociale, mais aussi des épidémies et des catastrophes qu’elle a dû affronter», souligne Nathan Badoud.

Une villa gallo-romaine

Last but not least: les archéologues ont aussi découvert les vestiges d’une villa gallo-romaine du Ier siècle après J-C. «Celle-ci reposait sur un vide sanitaire. Cet ouvrage de génie civil, composé d’amphores à huile venues d’Espagne (dont le contenu avait été consommé) permettait de drainer le terrain.» Une trouvaille inattendue!

Quant à savoir quand les visiteurs pourront découvrir ces trésors? «Côté fouilles, tout a été fait ou presque entre 2012 et 2015», stipule l’archéologue cantonal.

Pour le reste, il faudra vraisemblablement attendre 2025, une fois les travaux réalisés, afin que tombent enfin les palissades. Entre temps, il sera nécessaire de déterminer qui prendra en charge les frais d’exploitation et d’entretien du site.