Réaction à l'opinion "Notre neutralité) Pas touche!" de Michel Rossetti, ancien maire de Genève, publiée le 9 mars

Réaction à l’opinion «Notre neutralité? Pas touche!» de Michel Rossetti, ancien maire de Genève (GHI 8-9 mars)

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Les valeurs de la Suisse ne sont pas neutres

GHI a inséré dans ses éditions du 7 mars les réflexions de Monsieur Michel Rossetti, ancien maire de Genève, sur la préservation de la neutralité suisse. Ces réflexions méritent analyse et commentaire, tout en gardant à l’idée la déclaration de Monsieur Ignazio Cassis, alors président de la Confédération qui a indiqué, peu après le déclenchement par la Russie d’une guerre à grande échelle contre l’Ukraine, que la Suisse est neutre, mais les valeurs de la Suisse ne sont pas neutres.

On sait que les commissions des Chambres fédérales ont débattu de la possibilité d’autoriser la réexportation vers l’Ukraine d’armes d’origine suisse acquises par des pays tiers. Une telle autorisation, ponctuelle et limitée dans le temps, valable uniquement pour l’Ukraine, ne serait pas de nature à remettre en question la neutralité. Elle tiendrait compte, notamment, des résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies définissant la Russie en tant qu’Etat agresseur qui a foulé aux pieds le droit international et notamment humanitaire, et commet des crimes de guerre contre les civils ukrainiens.

L’article comporte un point discutable. Monsieur Rossetti évoque «les erreurs politiques commises avant le conflit par le gouvernement ukrainien et qui ont servi de prétexte à la Russie pour déclencher la guerre». Serait-ce une tentative de justifier un crime d’agression? Car l’unique «erreur politique» des Ukrainiens vis-à-vis de la Russie, c’est d’avoir opté pour un modèle de société démocratique et respectueux des droits de l’homme, c’est d’avoir rejeté le projet autoritaire, «stalinophile» et passéiste que le régime de Moscou a échoué à leur imposer.

Pour revenir à l’idée de neutralité, relisons le dernier paragraphe: «Et à propos de neutralité, ne serait-il pas opportun de faire comprendre à l’Ukraine tout l’avantage qu’elle pourrait tirer d’une neutralité armée, reconnue internationalement?» Le ton hautain n’est pas approprié, tandis que l’idée n’est pas opportune: la Russie lançait l’agression barbare contre le choix européen des Ukrainiens au moment même où l’Ukraine ne faisait partie d’aucune alliance.

Yaroslav Koval, ancien ambassadeur d’Ukraine