Jeunes militants: la relève est là!

Il y a, dans la toute jeune génération politique genevoise, un respect de l’adversaire, une écoute des arguments contraires, qui méritent d’être relevés. Certains aînés pourraient en prendre de la graine.

  • La jeune génération a compris la valeur intrinsèque de l’argument.123RF/DMITRII SHIRONOSOV

    La jeune génération a compris la valeur intrinsèque de l’argument.123RF/DMITRII SHIRONOSOV

Je n’ai jamais été un adepte du discours sur les générations: «Les jeunes sont comme ceci, les vieux sont comme cela.» J’avais 10 ans en Mai 68 et déjà me méfiais des paroles encensant la jeunesse, tout comme de celles qui la vilipendaient. On me parlait d’un conflit entre classes d’âge, je ne le comprenais pas: ce monde, que mes aînés de dix ou quinze ans rejetaient, convenait parfaitement à l’élève que j’étais. J’aimais la langue française, la grammaire, les exceptions, les hiboux, les joujoux, les poux.

Long malentendu

J’aimais passionnément l’histoire, avec ses guerres et ses traités, et peut-être plus encore la géographie, avec ses fleuves et leurs affluents. Plus que tout, la poésie, apprendre les poèmes, les réciter à haute voix, en étant juste sur la métrique, la prosodie, le souffle, le respect de la ponctuation. Toutes ces valeurs, je voyais bien qu’elles procédaient d’une longue tradition et n’éprouvais que reconnaissance face aux générations d’avant, qui nous l’avaient transmise. Je ne comprenais pas pourquoi les jeunes de 20 ans la contestaient. Ce fut le début d’un très long malentendu, qui d’ailleurs perdure.

Malgré tout cela, me voilà venant vous dire du bien des jeunes d’aujourd’hui. Pour une raison simple: depuis de longues années, j’ai conçu le projet de donner la parole, tous partis confondus, à la fine fleur de la relève politique. Je m’y emploie, sans relâche. Et suis frappé du rapport que la plupart d’entre eux entretiennent avec le débat politique. Beaucoup plus que nous à leur âge, ils gardent leur calme, argumentent, écoutent l’adversaire, toutes postures qui n’infléchissent en rien leur ligne de combat. Mais à l’ensemble de la bataille, elles donnent un style, un comportement, qui font plaisir à voir et à entendre. Pour tout cela, oui, j’aime infiniment organiser des débats avec des jeunes.

Antagonistes, mais solidaires

Je note aussi un autre élément: le choc, entre tel jeune militant d’Ensemble à gauche et tel autre du PLR, ou de l’UDC, est parfois violent, sur le fond, tant les visions du monde divergent. Mais jamais, il ne dérive à l’attaque personnelle, aux coups sous la ceinture, à la démolition de l’autre. Mieux : le tutoiement, aussitôt l’émission terminée, entre ces jeunes adversaires, est enfin de ceux qui sonnent juste. Il ne traduit pas la complicité de barbichette de tant d’aînés, non, il est celui de l’amitié et du respect, au sein d’une génération qui sait l’avenir difficile, notamment dans l’accès à l’emploi. Antagonistes sur les idées, mais solidaires. Il y a là quelque chose de beau.

A l’heure où, dans l’audiovisuel, notamment sur les écrans parisiens, tant de vieux briscards ne se singularisent que pour faire irruption, comme des coqs de combat, voilà, à Genève, une jeune génération qui, sans faire la moindre concession sur le fond, a compris la valeur intrinsèque de l’argument. Et les promesses de qualité d’un débat où l’on s’écoute, plutôt qu’on ne se lacère. Qui s’en plaindra?