Les vieux grognards

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Guy-Olivier Segond, c’est la dernière grande figure radicale à Genève. Il y en a encore eu deux après lui, François Longchamp et Pierre Maudet, et puis la dilution du parti de James Fazy dans le PLR, où les Vieux Grognards républicains ont été invités à partager les eaux des patriciens fatigués. Singulier destin! Imagine-t-on un vétéran de Waterloo, «dernier soldat de la dernière guerre», reprendre une arcade bancaire, en laissant son feutre au vestiaire? Pourquoi pas les patins, sur le parquet?

Les radicaux ont fait la Suisse moderne, celle de 1848. Ceux d’ici ont fait la Genève d’aujourd’hui, celle des institutions, l’école, l’hôpital, par exemple. Il y a là une tradition. Et un sens aigu de l’Etat. Non comme providence, ni comme arrosoir, à la manière où l’entrevoient les socialistes. Mais comme chose commune, au sens puissant, républicain.

Pour comprendre Guy-Olivier Segond, il faut remonter à la Réforme. Mais aussi aux grands principes de la Révolution française, ceux de l’Helvétique (1798), et bien sûr ceux du Printemps des peuples, l’année 1848. Il n’y a pas de radicalisme sans appel à l’histoire. Non pour conserver, mais pour réinventer.

Avec Guy-Olivier Segond, dont on espère un jour une biographie exhaustive, on est à des milliers de lieues marines du pur et simple profit financier. L’économie est au service de l’ensemble. Et l’Etat, un outil de l’émancipation humaine. Le radicalisme, c’est cela. Une grande idée, qui manque immensément, ces temps, à Genève.