Noirceur du pouvoir

2019 aura été, dans nos contrées, une année de préoccupations sociétâââles (à prononcer en prenant un air savant, et en laissant négligemment traîner le «a» final). On nous a construit, dans tous les sens, la théorie des genres, on a déconstruit (le mot qui fait fureur, plus prétentieux, à lui-seul, que tous les marquis de Molière) nos stéréotypes. On nous a délivré du mâle. On nous a annoncé la fin du patriarcat. On nous a corrigé la langue, les accords, on est venu polluer nos phrases, sous couvert d’épicène, de signes inutiles, plus lourds que le plomb. On nous a prédit la fin des nations, l’apocalypse du climat. On n’a cessé de nous promettre un monde nouveau. Quel monde?

2020 pourrait bien être l’année du retour à des réalités plus dures, plus terrestres. La permanence des nations, contre les toiles multilatérales. La puissante volonté de cohésion des communautés humaines, au sein de frontières bien définies, et non à l’échelle d’un improbable messianisme universel. Entre les peuples, des rapports de forces. Entre les humains, la noire, la sinistre, l’éternelle malédiction du pouvoir, celle qui corrode et corrompt toute aspiration à la beauté des liens.

Cette malédiction, nul n’y échappe. Ni les femmes, ni les hommes, ni les jeunes, ni les vieux. Dès qu’un humain envisage d’exercer sur un autre une forme quelconque de pouvoir, dès qu’il envisage d’exercer une domination, il entre dans ce chemin de mort qui nous disperse et nous divise. Nul d’entre nous n’y échappe: ni vous, ni moi, ni personne sur la Terre.