Procureur général: que le peuple choisisse!

ÉLECTION JUDICIAIRE • En se lançant, face à Olivier Jornot, dans la course au poste de procureur général,  Me Pierre Bayenet crée l’événement. 

  • Me Pierre Bayenet face  au procureur général Olivier Jornot: un vrai débat démocratique. CHOLLET/DR

    Me Pierre Bayenet face au procureur général Olivier Jornot: un vrai débat démocratique. CHOLLET/DR

Le 13 avril prochain, se tiendront à Genève les élections judiciaires. Au milieu de celles-là, celle du procureur général. Eh oui, Genève a la particularité de faire élire par le peuple le patron du Ministère public. Chez nous, un personnage de toute première importance: on songe notamment à Raymond Foëx, Bernard Corboz, Bernard Bertossa, Daniel Zappelli, et depuis deux ans, Olivier Jornot. Le titulaire de cette fonction est un personnage visible, connu, qui, non seulement requiert contre les criminels, mais oriente et définit les priorités de son domaine. Il s’agit, véritablement, d’un magistrat, le premier du pouvoir judiciaire. Si Olivier Jornot fut élu en 2012 par le Parlement et non par le peuple, c’est parce qu’il s’agissait d’une élection complémentaire, Daniel Zappelli ayant démissionné en cours de mandat. Mais là, nous touchons au terme, il s’agit d’élire un procureur pour un mandat complet. C’est donc bien au suffrage universel de se prononcer.

L’anti-Jornot

Cela va sans dire? Pas vraiment! A Genève, d’aucuns, notamment dans le cénacle judiciaire, mais aussi dans certains partis un peu groggys après les joutes électorales de l’automne dernier, s’accommoderaient bien d’une reconduction tacite de M. Jornot. Oh, l’actuel procureur n’a pas trop de soucis à se faire: il est aussi excellent dans cette fonction qu’il l’était comme politique, ayant présidé le parti libéral, et brillé à la députation. Mais enfin, nous sommes dans une démocratie, il est prévu qu’il y ait une élection, et toute personne, pourvu qu’elle dispose des titres requis, a le droit de se présenter. Par exemple, Me Pierre Bayenet. Ce jeune avocat (37 ans) est loin d’être un inconnu sur la scène judiciaire. Membre de Solidarités, soutenu par Ensemble à Gauche et la Jeunesse Socialiste, il a beaucoup fait parler de lui dans l’affaire du squat Rhino, ou, par exemple, en prenant la défense de victimes de violences policières. Ou encore, en défendant des sans-papiers. Bref, l’anti-Jornot. 

Deux conceptions 

Jornot face à l’anti-Jornot, n’est-ce pas exactement ce qu’on appelle la démocratie? Il est extraordinairement sain de pouvoir se prononcer entre deux conceptions de la politique criminelle. L’une, très sécuritaire, et assurément populaire par les temps qui courent. Et puis en face, une autre, sans doute minoritaire dans l’opinion, mais qui a parfaitement lieu d’être, droit à l’expression, au débat. Présent jeudi 16 janvier sur le plateau de Genève à chaud, c’est une conception cohérente, pensée, ancrée dans des valeurs, qu’a défendue Pierre Bayenet. Que les deux hommes (et peut-être, d’ici là, d’autres encore) se présentent, qu’ils débattent, et que le peuple, le 13 avril, décide. C’est cela, la démocratie.

Socialistes, réveillez-vous!

Quant au parti socialiste, qui dans un premier temps n’a pas soutenu Me Pierre Bayenet, il sera peut-être amené, le 20 février prochain en Assemblée générale, à revoir sa position. A cet égard, le rôle d’aiguillon de la jeunesse s’avère aussi sain que vivifiant. Car enfin, se contenter d’une élection tacite alors que la démocratie a l’occasion de se mettre à l’œuvre, ne donne pas franchement l’impression d’un parti en éveil, en position de combat. Vous me direz que c’est leur problème. Et ma foi, vous aurez bien raison