Quand la vigne devient féminine

VITICULTURE • Se faisant peu à peu une place dans le métier, les vigneronnes suisses ont même organisé leur premier salon à Rolle au début du mois de novembre.

  • Le nombre de femmes dans cet univers masculin est en augmentation. 123RF

    Le nombre de femmes dans cet univers masculin est en augmentation. 123RF

Entre le travail à la cave et la présence sur le salon Arvinis, au cœur des Automnales, le mois de novembre est chargé pour les vignerons genevois. Mais aussi pour les vigneronnes. Car, ces dernières sont de plus en plus nombreuses dans le monde viticole. «Et c’est tant mieux», lâche Emilienne Hutin.

Cette dernière a repris les rênes du domaine familial à Dardagny quand son oncle puis son père sont partis à la retraite. Selon elle, «le virage s’est fait il y a quinze-vingt ans environ. En 1992, sauf erreur, nous étions quatre contre une bonne quinzaine actuellement.»

Voire une bonne vingtaine, selon les chiffres de l’Office cantonal de l’agriculture et de la nature (OCAN). «Sans compter celles qui, sans être cheffe d’entreprise, jouent un rôle important dans la gestion de l’exploitation et la commercialisation des vins», précise le directeur de service de l’OCAN, Alexandre de Montmollin.

Une tendance que confirme Guy Ramu, président de l’Association genevoise des vignerons-encaveurs indépendants (Agvei), qui compte environ 20% de femmes selon lui. «Leur nombre augmente et je trouve cela très intéressant, assure-t-il. Il y a une différence de sensibilité. Et, du coup, le milieu viticole s’ouvre davantage.»

Emilienne Hutin confirme: «Forcément cela donne une autre dynamique!» Et Alexandre de Montmollin d’ajouter: «Ce sont de très bonnes communicatrices, innovantes et dynamiques.»

«150 dans toute la Suisse»

Pour célébrer ce renouveau, elles ont d’ailleurs organisé le premier salon suisse des vigneronnes. Intitulé DiVINes, l’événement qui s’est tenu le 6 novembre 2021 au château de Rolle a réuni une trentaine d’artisanes de la filière venues de tout le pays. La conceptrice du salon, citée par Le Temps, précise que si les vigneronnes ne sont plus regardées «comme des bêtes curieuses, elles restent très nettement minoritaires, quelque 150 dans toute la Suisse, soit quelques pourcents à peine».

Aux yeux d’Alexandre de Montmollin, «ce salon et le succès rencontré illustrent bien l’apport des femmes qui contribuent très positivement à faire évoluer l’image du vin en général».

«Démontrer nos compétences»

Comment s’est passée l’arrivée des femmes dans cet univers masculin? «Bien, répond Emilienne Hutin. Même s’il est vrai qu’il a fallu prouver notre capacité à assumer ce travail et démontrer nos compétences!» Alexandre de Montmollin abonde dans son sens: «Il faut leur reconnaître une bonne dose de courage et de détermination pour s’affirmer dans une branche de l’agriculture qui reste très traditionnelle.»

Quid du résultat? Les vins «féminins» sont-ils différents? Là encore les avis de Guy Ramu et de la vigneronne genevoise se rejoignent. Pour le président de l’Agvei, «avec un même cépage, chaque vigneron produira un vin à son image. Cela est lié à notre ressenti, notre palais, notre manière de travailler.» Même son de cloche pour Emilienne Hutin: «Les vins sont forcément tous différents mais cela est lié à la personnalité de chaque vigneron, qu’il soit homme ou femme…»