Ces minorités qui nous tyrannisent

Antispécistes, ultraféministes, écologistes radicaux, militants LGBT: tous prônent une vision oppresseur/opprimés de la société. Leurs armes: les médias, les tribunaux et les réseaux sociaux. A Genève, leur influence est grandissante. Notre dossier.

  • Sous couverture d’un combat justifié,

    Sous couverture d’un combat justifié, les minorités étouffent le débat public. DR

Depuis quelques mois, l’atmosphère devient étouffante. Chaque semaine ou presque, l’espace public est le théâtre d’une nouvelle revendication de la part des minorités. Leur cible préférée? L’homme blanc hétérosexuel. Symbole absolu du mal dominant, il cristalliserait tous les maux. Pour le combattre, il convient de «nettoyer la société» au nom du Bien. Dernier exemple en date? La féminisation de 250 panneaux de signalisation en Ville de Genève. Une opération à 56’000 francs qui a débouché sur une polémique sans précédent, symbole d’une époque où le débat s’est polarisé. On est pour ou contre.

Quitte à remplacer la nuance par la violence verbale comme le souligne Myret Zaki, journaliste et ancienne rédactrice en chef du magazine économique Bilan: «Les minorités peuvent se montrer très virulentes face aux idées opposées, et mettre au pilori leurs opposants. Les réseaux sociaux permettent d’amplifier les polémiques, de pointer du doigt, de blâmer et de condamner sans jugement.»

Ce que réfute Lorena Parini, coprésidente de la Fédération genevoise des associations LGBT: «Les minorités ne refusent jamais le dialogue. Lorsque la majorité, ou ceux qui parlent pour elle, ne respecte pas les minorités alors le dialogue peut être rompu.»

«Oppression totalitaire»

Force est de constater que ce dialogue est de plus en plus souvent rompu. Dans leur dernier livre Délivrez-nous du bien, l’essayiste française Natacha Polony et le journaliste économique Jean-Michel Quatrepoint vont même plus loin: «Au nom du bien, ce sont toutes nos libertés, tout ce qui a fait la force de nos démocraties et le plaisir d’y vivre, qui vont disparaître pour faire place à cette forme subtile d’oppression totalitaire.» Tout en précisant que la société actuelle, qui n’a que le mot «liberté» à la bouche, n’a jamais produit autant d’interdits, de restrictions et de suspicions.

Qu’elles soient antispécistes, écologistes radicales, ultraféministes ou LGBT, les minorités font preuve d’une évidente habileté pour arriver à leurs fins. Elles revendiquent d’abord un combat justifié: le bien-être animal, la sauvegarde de l’environnement, l’égalité entre hommes et femmes ou encore la lutte contre l’homophobie. Leur méthode pour imposer leurs revendications? Former des groupuscules très organisés qui agissent dans les médias traditionnels et sur les réseaux sociaux, à coup de pétitions en ligne.

Individualisation de notre société

Sommes-nous passés de la tyrannie de la majorité, rendue célèbre par le philosophe Alexis de Toqcueville, à celle des minorités? L’éditorialiste Eric Conan en est convaincu: «Un petit groupe bien organisé parvient à imposer ses intérêts, sa volonté ou ses idées à un plus grand groupe rendu vulnérable par les divisions ou le manque d’organisation.»

L’écho grandissant des minorités serait-il aussi lié à l’individualisation croissante de notre société? Myret Zaki nuance: «L’individualisation fait que chacun veut être reconnu pour qui il est, et n’a pas de sentiment collectif. Je crois surtout que la gauche a délaissé la lutte des classes pour se concentrer sur la lutte des minorités. Elle se préoccupe moins des pauvres et des déclassés de la périphérie que des minorités raciales, sexuelles ou religieuses des grandes villes.» Lorena Parini va plus loin. Elle réfute l’idée d’un destin collectif: «Ce que l’on entend par commun est souvent une façon de dire «ce que la majorité ou les classes dominantes veulent.»

Autocensure

Natacha Polony et Jean-Michel Quatrepoint mettent en garde: «A partir d’un juste combat contre les discriminations et le racisme, on a progressivement dérivé vers une dictature des minorités. Leur harcèlement médiatique, juridique, aboutit à une censure et surtout à une autocensure. De la presse, certes, mais aussi des discours publics.» La bien-pensance est morte, place à l’ultra-politiquement correct…

Une omerta généralisée

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les minorités sont très loquaces quand il s’agit de revendiquer tout et son contraire. En revanche, quand la presse les contacte pour évoquer leur lobbying, elles refusent tout dialogue. Jolie démonstration de leur ouverture d’esprit. Pour les besoins de cette enquête, les porte-parole des principales minorités ont été sollicités. Au lieu de répondre à nos questions, ils se sont terrés dans le silence. Comme l’Association antispéciste PEA qui se justifie ainsi: «Cela n’a aucun intérêt de nous présenter en tant que minorité vu que cela ne va pas faire avancer nos idées.» Même son de cloche de la part de la GMS, une organisation pour les minorités en Suisse: «Malheureusement, nous ne pourrons pas répondre à vos questions.» L’antenne genevoise de Pro Natura, généralement prompte à défendre sa cause, n’a pas daigné répondre à nos sollicitations, malgré nos nombreuses relances. Quant aux divers sociologues de l’Université de Genève, ils ont fait preuve d’une imagination sans borne pour prétexter une excuse afin de ne pas répondre à nos questions. Cette omerta généralisée prouve, si besoin était, que la question de l’influence des minorités dérange…