- Champ-Dollon détient le record de Suisse des détenus étrangers. - Une centaine de nationalités se côtoient dans une prison surpeuplée. - La nouvelle politique permettant d'incarcérer les multirécidivistes fait exploser le taux d'occupation.
La semaine dernière, le taux d'occupation de Champ--Dollon était de 186%!
Champ-Dollon détient le record de détenus étrangers de toute la Suisse. Avec 92,8% d'étrangers, elle affiche 10% de plus que la moyenne nationale (lire ci-contre). Un chiffre impressionnant qui est toutefois nuancé par la Commission des visiteurs du Grand Conseil de la prison genevoise préventive: «Le problème est le manque cruel de places dans les prisons en exécutions de peines du pays, analyse la députée socialiste Loly Bolay. A Genève, près de 250 détenus purgent leur peine dans une prison préventive, ce qui n'est pas tolérable.» Son confrère, le PLR Renaud Gautier est aussi d'avis que les détenus en exécution de peine pourraient fausser totalement les statistiques carcérales: «En sortant les chiffres de ces prisonniers condamnés purgeant une peine dans une prison préventive, je pense que le ratio de détenus étrangers est le même que dans les prisons suisses. Malheureusement, les faits sont là, il n'y a plus de places dans les prisons romandes et au Tessin.»
Convention
Un souci qui a d'ailleurs été pointé du doigt par Pierre Maudet, conseiller d'Etat chargé de la Sécurité. Fin novembre, avec les autres membres du Conseil d'Etat, il a annoncé la construction d'une nouvelle prison pour les exécutions de peines, justement pour combler cette lacune (lire ci-dessous).En attendant, si Champ-Dollon souffre de surpopulation carcérale étrangère, c'est aussi parce que le Département de la sécurité a serré les boulons. Comment? Cet été, il a signé une convention avec le Ministère public permettant d'incarcérer 6 mois fermes les malfrats dès la seconde récidive et sur simple contrôle d'identité. «Il est vrai que la nouvelle politique contre les multirécidivistes a participé à l'augmentation des prévenus étrangers à Champ-Dollon», relève le magistrat Pierre Maudet. Il annoncera dans une prochaine conférence de presse le bilan de cette traque aux multirécidivistes de la délinquance de rue.
Exécutions de peines en augmentation
Parallèlement, l'application du nouveau Code de procédure pénale implique aussi de pouvoir écrouer un récidiviste condamné à une petite peine, même cinq ans après sa condamnation. En d'autres termes, il y a aujourd'hui moins de détentions préventives mais bien plus d'exécutions de peines. Enfin Alpha, l'opération de la police menée en octobre pour combattre la violence dans les rues ainsi que le trafic de drogue (lire ci-dessous) a aussi été un facteur déterminant dans la surpopulation carcérale des étrangers.
Maillon faible de la détention
En mettant le doigt sur la problématique genevoise considérée comme le maillon faible de la détention, Champ-Dollon affiche actuellement un taux d'occupation de 186%. «Nous avions 702 détenus le 29 novembre, détaille le directeur Constantin Franziskakis. Il s'agissait là d'un record. Nous avons même dû placer sept détenus sur des matelas posés au sol et placer six personnes dans des cellules prévues pour trois…» Il s'agit d'un record absolu depuis que la prison a passé de 270 à 376 places en 2011.
Les «inshootables» tremblent
ChZ • Le dispositif Alpha pour permettre de combattre la violence dans les rues et le trafic de drogue a permis d'augmenter les contrôles de 54% en octobre par rapport à la moyenne des neuf premiers mois de l'année. Vingt-cinq délinquants, condamnés par ordonnance pénale à une peine ferme, ont pu être arrêtés uniquement sur la base d'un contrôle. La présence policière sur le terrain intègre l'ensemble des services de police. Il s'agit des opérations Mousquetaires: délinquance de rue; Hydra: trafic d'héroïne; School: surveillance des préaux d'écoles; Tembo: trafic de cocaïne; Rempart: nuisances en Vieille-Ville; Basilic: contrôles renforcés autour de la gare et de l'église Notre-Dame; Points de contact: présence accrue de patrouilles dans des endroits sensibles du canton durant au moins trente minutes par jour.Pour traquer les inshootables ñ nom donné aux inexpulsables - la police a également établi un nouveau et plus large périmètre d'interdiction, qui couvre quasiment toute la ville. Par ailleurs, une révision de la loi autorise désormais une exclusion jusqu'à 12 mois et pour des motifs autres que le trafic de drogue. Comme les lésions corporelles, rixes, agressions, vols, brigandages et dommages à la propriété. Une quinzaine d'exclusions ont été prononcées en octobre dernier.
