Un an après la mise en circulation de la monnaie locale, 80’000 Lémans sont en circulation. «C’est exceptionnel, s’enthousiasme Jean Rossiaud, président de Monnaie Léman. Personne dans l’association ne s’attendait à ça!»
La clé du succès: une bonne idée qui correspond à l’air du temps. Car, comme monnaie complémentaire, le Léman n’entend pas se substituer au franc ou à l’euro, mais prône «une consommation responsable, écologique et sociale». En clair, en payant avec des Lémans, les utilisateurs «relocalisent l’économie», poursuit Jean Rossiaud. Ce que confirme Nathalie, gérante du café des Savoises, à Plainpalais, quand elle évoque certains de ses fournisseurs qui acceptent, eux aussi, la monnaie.
Mais une bonne idée, seule, ne suffit pas (forcément) pour faire un succès. Celui du Léman a été rendu possible par l’implication de commerces, entreprises et prestataires de services, genevois, vaudois (la monnaie s’est développée à Lausanne depuis quelques mois) ou de France voisine. Ils sont ainsi 300, dont les trois quarts à Genève, à accepter cette monnaie.
«Qu’est-ce que c’est que ce truc?»
Quant aux utilisateurs, ils sont quelque 1200 à venir échanger leurs francs contre des Lémans. Seulement? Dans la rue, rares sont ceux qui connaissent la monnaie complémentaire locale. Comme Sasia, qui découvre son existence tout en se questionnant sur sa pertinence. «J’ai déjà des francs et des euros, qu’est-ce que je vais m’embêter avec une troisième monnaie?» Loris, lui, s’il se dit plutôt favorable à une telle initiative, craint le peu de commerces participant. «Si je me retrouve avec de l’argent que je ne peux pas utiliser, cela ne me sera pas très utile…»
Jean Rossiaud entend ces réticences. Celles des entreprises aussi. Mais, selon lui, elles ont de moins en moins cours. «Il y a eu beaucoup d’incompréhension au début, il fallait être très pédagogue, faire comprendre que ce sont les entreprises qui ont le plus à y gagner.» A ce niveau-là, la gérante du Café des Savoises n’est plus à convaincre, même si elle a, elle aussi, un bémol: «On ne peut pas payer ses impôts en Lémans», reproche Nathalie. Pas encore, aurait-elle pu ajouter.