«L’installation à Genève de l’Opéra des Nations est une aventure exceptionnelle»
Rémy Pagani, conseiller administratif en Ville de Genève
«Tour de force logistique, prouesse artistique, technique et financière… L’installation à Genève de l’Opéra des Nations est une aventure exceptionnelle», résume, avec un lyrisme de circonstance, le conseiller administratif Rémy Pagani. «Négocier, acheter, transporter, localiser, rebâtir et agrandir le Théâtre Ephémère, conçu à l’origine pour les représentations de la Comédie-Française en rénovation à Paris, a été un travail de titan. Il a fallu près de 70 semi-remorques pour transporter les 1000 mètres cubes de bois dans un entrepôt de la zone industrielle de Meyrin», pointe notamment le magistrat en charge des Constructions et de l’Aménagement à la Ville de Genève.
Gigantesque
Ce n’est pas tout. Pour réaliser le gigantesque déménagement de l’institution lyrique genevoise, dont le bâtiment à la place Neuve sera fermé pendant deux ans et demi pour des travaux de rénovation, il a fallu repenser le pavillon.
«Initialement prévue pour accueillir 750 spectateurs, la capacité d’accueil a été portée à 1064 places. Une nouvelle fosse d’orchestre a été intégrée au projet ainsi que des loges d’artistes», précise Rémy Pagani. Avant de poursuivre: «L’Opéra des Nations sera installé dans la campagne Rigot. La cérémonie du lancement des travaux est prévue pour le 16 février 2015 (lire ci-contre). Le pavillon devrait être opérationnel dès janvier 2016 et accueillir productions lyriques, ballets, récitals et concerts pour au moins deux saisons et demi», se réjouit l’élu, véritable cheville ouvrière du mégaprojet estimé aujourd’hui à 10 millions de francs. «Entièrement financés par de généreux mécènes et des membres du Cercle du Grand Théâtre», précise-t-il (lire ci-dessous).
Changer ses habitudes
Reste que la campagne Rigot ce n’est pas vraiment le voisinage habituel du prestigieux Grand Théâtre de Genève. «C’est vrai. L’institution s’installe provisoirement loin de ses bases dans un quartier à vocation plutôt internationale», reconnaît Tobias Richter, directeur du Grand Théâtre. Qui voit dans ce déménagement de la rive gauche à la rive droite une occasion unique de développer une nouvelle dynamique. «Le public, près de 100’000 spectateurs par saison, doit changer ses habitudes, vaincre certains préjugés et s’ouvrir à de nouvelles rencontres. D’autant que la nouvelle salle, bien que confortable, s’apparente plus à une grande scène populaire. Elle me fait penser au théâtre du Jorat à Mézières. L’équipement et la machinerie seront moins sophistiqués, plus simples que ceux utilisés à la Place Neuve. Au fond, le beau n’a nul besoin d’être luxueux.»
Adapter la programmation
Est-ce à dire que la programmation va également changer de visage et adopter un profil moins prestigieux? «Il faudra l’adapter aux caractéristiques de la nouvelle salle plus propice à un répertoire opéra-comique ou opéra baroque», convient Tobias Richter. Qui s’inquiète davantage de devoir faire le grand saut en plein milieu de la saison 2015-2016. «Nous devrons déménager entre le spectacle de décembre et la reprise de janvier. Pendant près d’un mois, l’activité se concentrera surtout en coulisses. Entre 150 et 200 personnes devront changer complètement d’environnement, recréer en un temps record un nouveau foyer et faire vivre la nouvelle scène de l’Opéra des Nations», reconnaît Tobias Richter, habitué à ce genre de grand chambardement. «C’est la cinquième fois dans ma carrière que cela m’arrive. Je sais exactement à quoi m’en tenir», précise celui qui avait notamment accompagné le déménagement provisoire de l’opéra de Zurich au Hallenstadion. C’était dans les années 70. Là aussi, le déménagement avait contraint les équipes à courir un marathon à la vitesse d’un 100 mètres. Il faudra rééditer l’exploit à Genève pour réussir cette aventure éphémère appelée à marquer durablement la carrière de Tobias Richter et la vie lyrique genevoise.