Conseil municipal : Un élu sur deux abandonne son poste

- Plus de 50% des conseillers municipaux genevois ont été remplacés au cours de la dernière législature.
- Les communes les plus touchées sont Meyrin, Chêne-Bourg et Onex.
- Katia-Horber-Papazian, professeur de politique locale à l'Institut de hautes études en administration publique (IDEHAP) livre son analyse.

  • De nombreux démissionnaires évoquent une charge de travail trop importante.

    e nombreux démissionnaires évoquent une charge de travail trop importante.

Conseiller municipal, une fonction à haut risque. C'est ce qui ressort des statistiques de la Chancellerie d'Etat. Ainsi, pendant la législature 2007-2011, pas moins de 450 remplacements de conseillers municipaux ont été enregistrés. Cela représente très exactement 50,22% des élus. Une hécatombe qui se poursuit puisque dans l'actuelle législature (2011-2015), 247 élus ont déjà abandonné leur siège en cours de mandat.

Démissions en série

Parmi les communes les plus touchées, Meyrin, Chêne-Bourg et Onex détiennent les records. A la fin de la législature 2007-2011, ces municipalités avaient perdu respectivement huit, dix et onze conseillers municipaux sur un total de 85. Une réalité qui n'étonne pas les principaux concernés: «Nous peinons à trouver des collègues sérieux parce que l'engagement politique n'est pas aussi valorisé qu'avant, confie une élue meyrinoise qui préfère garder l'anonymat. Non seulement le travail communal n'enrichit pas financièrement, mais en plus il n'est pas véritablement reconnu sur le plan professionnel. Dans de telles conditions, la population est moins motivée à s'impliquer dans la chose publique.»

Rivalités et burn-out

Hormis les décès et les déménagements, qui représentent environ 50% des motifs de démission, les fortes rivalités politiques et les burn-outs deviennent de plus en plus fréquents. «De nombreux démissionnaires évoquent une charge de travail trop importante», précisent de concert François Mumenthaler, président du Conseil municipal à Onex, et Beatriz de Candolle, conseillère administrative à Chêne-Bourg. Car en plus de la quarantaine d'heures hebdomadaires effectuées dans leur profession de base, la plupart des conseillers municipaux des communes participent à une quinzaine d'heures de séances de commissions et de séances plénières. «Pour les personnes forcées de voyager dans le cadre de leur métier ou régulièrement soumises à des heures supplémentaires, il devient très difficile de concilier vie professionnelle et vie politique», avance Beatriz de Candolle.

Campagne pour la cohésion

Reste que ce phénomène inquiétant, qui met sérieusement en péril le bon fonctionnement des communes, frappe moins les communes rurales que les villes. «Comme la plupart des communes éloignées du centre-ville, notre Conseil municipal n'est représenté par aucun parti politique, avance Gabriel Dethurens, secrétaire général de la mairie de Laconnex. Cette configuration nous évite les rivalités trop fortes et des discussions trop animées.»Michel Vazquez, secrétaire général de Meinier, relève pour sa part la proximité entre les élus: «Dans une petite commune comme la nôtre, tout le monde se connaît. C'est plus motivant de s'impliquer dans la vie communautaire dans ces circonstances.» Et Catherine Kuffer, présidente de l'Association des communes genevoises (ACG) de conclure: «Une plus grande solidarité entre élus serait le meilleur remède à cette affligeante tendance. Mais à mon avis, celle-ci n'est pas près de s'inverser», regrette-t-elle amèrement.

 

Carton rouge à Thônex

JFt • Au Conseil municipal de Thônex, le taux de démission bat des records. Sept élus ont déjà démissionné et un huitième est en passe de jeter l'éponge. «Après une année et demie de législature, on a déjà dû remplacer près d'un tiers de nos 27 élus», se désole le maire Claude Détruche. Si deux conseillers ont renoncé pour des raisons légitimes (santé, déménagement), les motifs invoqués par les autres le laissent plus dubitatif. «Il y a des personnes qui s'engagent mais ne trouvent pas leur compte. D'autres qui se retrouvent avec une surcharge de travail à laquelle ils ne s'attendaient pas», énumère-t-il.Dindons de la farce? Les électeurs. Notamment ceux qui ont voté pour les candidats du MCG. «Ils étaient trois à siéger. Deux ont démissionné, il y a 5 mois. A ce jour, on attend toujours leurs remplaçants! C'est un manque de respect pour leurs électeurs et pour notre Conseil municipal», tonne l'ancien arbitre de football. Pour lui, il y a des cartons rouges qui se perdent à Thônex… «Siéger dans un conseil municipal, c'est comme jouer dans une équipe de foot», poursuit-il. «Si un joueur est blessé, on le change. Las, certains élus simulent pour sortir, sous l'injonction de leur parti. Au motif qu'ils trahissent les idées du groupement. Ou alors pour placer à la mairie l'une de leurs têtes de liste, en vue des prochaines élections.»