180 jours-amende requis contre Dieudonné

L'humoriste français comparaissait en ce lundi 5 juillet à Genève pour des propos tenus sur les chambres à gaz lors de spectacles en Suisse romande, en 2019. Verdict jeudi 8 juillet.

  • Dieudonné M’Bala M’Bala à la sortie du Palais de justice. MARIE PRIEUR

Drôle ou pas? Ce n’est pas la question du jour, tranche Stéphane Grodecki. Aux yeux du procureur, «Hurler: «les chambres à gaz n’ont pas existé», c'est intentionnellement cracher sur la mémoire des victimes, c'est continuer à propager une haine viscérale des juifs.» De quoi requérir 180 jours-amende à 200 francs par jour sans sursis à l’encontre de Dieudonné M’Bala M’Bala.

En ce lundi 5 juillet, l'humoriste français, âgé de 55 ans, comparaît à Genève devant le Tribunal de police. Il est poursuivi pour «discrimination raciale» pour des propos tenus sur «les chambres à gaz» lors de spectacles à Nyon et à Genève, en 2019. Mais aussi pour «injure» à l'égard de la Coordination intercommunautaire suisse contre l'antisémitisme (Cicad) et pour «diffamation» à l'encontre de Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la Cicad.

«Je suis abasourdi d'être ici»

A l'ouverture de son procès, Dieudonné déclare d’emblée: «Je suis vraiment étonné, abasourdi d'être ici. C'est la première fois en trente ans de spectacle qu'un de mes personnages se retrouve devant un tribunal.» Des propos qui donnent le ton de sa défense. Selon l’humoriste, la phrase: «Les chambres à gaz n'ont jamais existé» a été prononcée en spectacle par l'un de ses personnages. «C'est une réflexion qui tombe dans la panique, explique l’humoriste. Ce personnage va être dans une outrance démesurée, il va nier la réalité.» 

Interrogé par la présidente Sabina Mascotto sur sa propre opinion, le prévenu répond: «Je ne nie absolument pas l'existence des chambres à gaz. Je reconnais la souffrance des victimes de la Seconde Guerre mondiale.» Rappelant que le sketch incriminé a été coécrit par Germain Gaiffe-Cohen, Dieudonné explique: «Je comprends sa démarche. Il a perdu tellement de gens de sa famille dans les camps… On a besoin d'extérioriser, de s'amuser de ses douleurs profondes. L'humour, c'est le marchepied vers la sérénité.» 

«Profondément blessants et choquants»

L'audience se poursuit à propos de l'accusation d'injure à l'encontre de la Cicad. A savoir: «Il faut leur dire aux gens de la Cicad d'aller se faire en…» Des propos que Dieudonné nie avoir prononcé. Et que, de son côté, le président de la Cicad, Laurent Selvi, qualifie de «profondément blessants et choquants». Enfin, le tribunal examine l'accusation de diffamation envers le secrétaire général de la Cicad. Dieudonné s’en défend, taxant Johanne Gurfinkiel de «malhonnête et raciste».  

De quoi faire dire à l’avocat de la partie plaignante, Me Philippe Grumbach: «Dieudonné a essayé d’inverser les rôles. De se poser en victime et de faire de la Cicad et de Johanne Gurfinkiel le bourreau. Mais, n’inversons pas les rôles! Ce procès n’est pas celui de la liberté d’expression, c’est le procès de l’antisémitisme.» 

Au contraire, Me Pascal Junod, défenseur de Dieudonné, estime qu’on «fait le procès du rire». Il loue le rôle du «fou du roi» et s’étonne que «trois secondes dans un spectacle d’une heure trente conduisent dans un tribunal, voilà ce qui est choquant! On ne juge pas un opéra sur une partition de trois notes.» Estimant que «l’instruction a été menée à charge», il demande que son client soit acquitté.

Verdict jeudi 8 juillet à 14h.