14’000 Genevois contestent leurs bûches

  • Le nombre d’oppositions aux contraventions, liées notamment à la circulation, explose depuis 2014.
  • Une hausse estimée à près de 400% qui surcharge les services administratifs de la Justice et de l’Etat.
  • Conséquence, une task force a été créée pour éponger le retard et éviter des prescriptions. Notre dossier.

  • Le nombre de contestations est passé en 3 ans de 2800 à plus de 14’000. GETTY IMAGES/WAKILA

    Le nombre de contestations est passé en 3 ans de 2800 à plus de 14’000. GETTY IMAGES/WAKILA

«La masse d’oppositions aux contraventions ne va pas cesser de croître»

Henri Della Casa, porte-parole du pouvoir judiciaire

La justice est débordée par des contestations de contraventions. Du jamais vu dans les annales du Palais de justice! «Le nombre de contestations est passé d’environ 2800 en 2013 à 14’000 en 2016, indique Henri Della Casa, porte-parole du Pouvoir judiciaire. C’est un véritable déferlement d’oppositions que le Tribunal de police doit ou est appelé à traiter.» En chiffres, cela représente une augmentation de près de 400% de contestations de contraventions, en 3 ans. Enorme! Imaginez en effet que le Tribunal pénal avait reçu, en date du 22 mars et rien que depuis février, 502 dossiers du stock des affaires en retard de la part du Service des contraventions (SdC).

Ce volume important d’oppositions provoque un surcroît de travail et a obligé l’Etat et la Justice à constituer une task force en ressources auxiliaires. Ainsi, trois auxiliaires juridiques administratifs mettent les bouchées doubles pour examiner toutes les oppositions et éviter des prescriptions. En mai, des juges suppléants viendront en renfort. Leur boulot? Instruire ces centaines de dossiers contestés depuis 2014, dont la majorité concerne, notamment, des contraventions liées à la circulation en hausse depuis 2014. Engagés en urgence, ces auxiliaires juridiques doivent aussi rattraper 1500 ordonnances pénales qui risquent de passer à la trappe pour cause de prescription (lire ci-contre).

Ce volume de travail surcharge certains services de la justice. Au point que la Commission de gestion du Pouvoir judiciaire a été saisie en début d’année, afin d’évaluer les conséquences de cette déferlante d’oppositions sur le travail du Pouvoir judiciaire. «La masse d’oppositions à des contraventions que le Service des contraventions a transmise au Tribunal de police, depuis février dernier, vient s’ajouter aux centaines d’autres affaires courantes transmises depuis cette date par le même service», précise Henri Della Casa.

Les causes de ces oppositions sont multiples. En partie, elles peuvent être dues à la forte hausse des barèmes des contraventions et des émoluments survenus en 2014 et 2015.

Preuve sans doute, aussi, que la Justice ferait bien de considérer à nouveau les plus de 16’000 signataires qui ont paraphé l’an dernier la pétition GHI Stop aux contraventions abusives, qui demandait notamment la baisse de certaines amendes cantonales liées à la circulation. Le Département de la Sécurité l’a fait en baissant les tarifs des émoluments depuis le 1er janvier 2017. Reste à vérifier si cette sage décision se répercutera sur le nombre des oppositions de l’année en cours.

Cap des 100'000 procédures judiciaires franchi

L’activité des juridictions pénales se stabilisent dans les filières du droit public, civil, conciliations et baux et loyers. Elle est en hausse en revanche notamment dans les contentieux des affaires de travail (prud’hommes). Parallèlement, les activités du Tribunal pénal se sont accrues. C’est particulièrement le Tribunal de police qui est surchargé avec l’augmentation des oppositions aux ordonnances pénales (lire ci-dessus), mais aussi la problématique des expulsions de délinquants étrangers. Le procureur Olivier Jornot a également relevé l’intense activité déployée en matière de protection des mineurs avec la création temporaire d’une chambre supplémentaire au Tribunal de protection. Par ailleurs, l’activité des juridictions pénales est en voie de stabilisation même si, pour la deuxième année consécutive, le seuil des 100’000 procédures traitées a été franchi.