VISITEURS • Souvent, je pense aux touristes, de passage à Genève. Ils sont dans notre ville pour deux ou trois jours, qu’avons-nous à leur offrir? Oh certes, se promener sur les quais, contempler par beau temps l’une des plus belles rades du monde, Mont-Blanc, Voirons, Salève, Jura. Pour ma part, voilà plus de cinq décennies que je ne m’en lasse pas. Et puis, la Cathédrale, et quelques beaux musées, même si celui d’Art et d’Histoire, comme vous l’avez peut-être noté, mérite un léger toilettage.
Mais enfin, tout cela est un peu juste. Manque d’accueil, de générosité, d’ouverture. Tenez, la place des Nations: je la connais par cœur, comme d’ailleurs le quartier de Sécheron, en totale révolution par rapport à celui de mon enfance. Aux Nations, ils viennent par centaines. Qu’ont-ils à contempler? De sympathiques jets d’eau, ça va cinq minutes. Une Chaise brisée, disons deux minutes. La fresque d’Erni, quarante secondes. Photographier l’allée de drapeaux du Palais des Nations (sans intérêt, mais enfin, si ça les chante), disons deux minutes. Et puis? Basta!
Les plus motivés visiteront le Palais des Nations, mémoire de la SDN, et de sa totale inaptitude à régler, dans les années trente, le tragique de l’Histoire. Mille fois mieux lire Belle du Seigneur, Adrien Deume qui taille ses crayons, là il y a du génie. Bref, moi qui passe tous les jours de promenade à la place des Nations, je les plains un peu, ces frères humains qui ont fait des milliers de kilomètres, pour se trouver devant une telle absence de mise en contexte, et finalement de sens. Genève mérite mieux. Il y faut y élever le niveau de l’accueil touristique. Ça passe par des hommes et des femmes de culture. Pas seulement par des marchands.