Commentaire - Le roi soleil

  • Pascal Décaillet. dr

    Pascal Décaillet. dr

Une nuée de motards, toutes sirènes hurlantes, clignotant bleu qui crépite dans la nuit parisienne: le scénario, l’un des plus débiles de l’Histoire télévisuelle, fut mis au point la première fois le soir de l’élection de Jacques Chirac, en mai 1995. Déjà, c’était le degré zéro du signifiant. Mais au moins, l’intéressé avait gagné! C’était au soir du deuxième tour, et de sa victoire contre Lionel Jospin.

Mais au nom de quoi la télévision française a-t-elle osé, au soir de ce dimanche 23 avril 2017, nous imposer un remake de la marche triomphale et vrombissante du maire de Paris, devenu Président? En quoi le trajet d’Emmanuel Macron, sorti en tête du premier tour, justifiait-il ces cohortes et cavalcades motorisées, en direct satellite mondial psychédélique, juste pour accompagner un type qui se rend… dans une brasserie de Montparnasse?

Il y avait plus de caméras, ce soir-là, pour un vainqueur d’étape qui va au bistrot, qu’il n’y en avait à Varsovie, en décembre 1970, lorsque Willy Brandt, chancelier en exercice d’Allemagne fédérale, s’était agenouillé, devant le Monument du Ghetto. Et pour sa victoire du second tour, si c’est lui? On le filme jusque dans sa chambre à coucher? Via la salle de bains? Mais diantre, même Louis le Quatorzième, dont nous visitâmes tous avec émerveillement les appartements de Versailles, n’a jamais bénéficié d’une attention aussi soutenue. L’ère de M. Macron sera-t-elle celle du Roi Soleil? Avec ses courtisans. Et ses nuées de valets.